Pendant toute la durée de la pandémie mondiale, de la clôture de nos lieux de vie, à la tombée des masques, nous avons vécu dans le présent. Un temps présent angoissant, épuisant et douloureux qui nous a empêché toute projection.
Or, à vingt ans, nous avons besoin de projections.
Pour se rappeler pourquoi on trime à la fac, pour s’encourager lorsqu’il faut aller taffer après les cours, pour se raccrocher à quelque chose quand certaines fois les doutes nous font perdre le sens.
Mais la pandémie nous à arraché toute perspective de projection.
Alors, nous avons vécu au jour le jour en essayant d’oublier ce que nous avions prévu de faire et en se raccrochant « au monde d’après ». Au début, nous avons même essayé de voir le verre à moitié plein et toutes les opportunités que toute cette situation nous offrait: du temps avec nos proche, un retour sur soi, un espace artistique …
Mais rapidement nous avons pris conscience du prix de cette crise.
Des vies enlevées derrières les chiffres, des corps brisés par la maladie, des angoisses profondément ancrées. Nous ne seront plus jamais les mêmes et le nouveau futur qui s’écrirait ne sera pas celui que nous avions rêvé d’écrire.
La spécificité supplémentaire de cette situation, c’est que nous ne l’avons pas choisi, aucun.e d’entre nous. Elle nous est tombée dessus et nous avons du composée avec. Alors nous avons rencontré la résilience, le lâché prise, nous avons pris conscience de toutes ces choses qui ne dépendent pas de nous.
Je trouve que cette prise de conscience a rendu d’autant plus difficile la reprise de la vie. Lorsque les restaurants, les bibliothèques, les cinémas ont réouvert, lorsqu’il a fallu repartir travailler « en présentiel », je crois que c’est à ce moment là que j’ai pris conscience des conséquence de cette crise, profondément ancrées en moi et installées pour longtemps.
J’étais incapable de me reposer, d’être heureuse, dans l’instant. Toujours collée à mes écrans, j’attendais la prochaine annonce gouvernementale, la prochaine crise. Mon cerveau et mon corps étaient étaient en mode survie et ils n’avais pas prévu d’en ressortir d’aussi tôt. Surtout que si la vie telle que l’on la connaissait c’était arrêtée, le temps, lui, a continué à tourner ….
Suppression des moments symboliques
Le temps, je me suis longtemps battue contre lui. Avide de tout vivre, de tout expérimenter, je courrais après les heures, les minutes, les secondes. Mais à la sortie des confinements, lors de la grande réouverture, j’ai compris que le temps que le COVID nous avait pris ne nous serait jamais rendue.
Nous ne vivrons jamais notre dernière année de lycée.
Nous ne rencontrerons jamais notre nièce pour la première fois.
Nous n’assisterons pas à notre remise de diplôme.
Nous ne réaliseront pas ce premier voyage ensemble à New York.
Nous ne dirons pas au revoir à notre grand-mère une dernière fois
Le COVID a arrêté nos vie, mais la terre, elle, a continué de tourner et le temps avec elle.
Tous ces moments symboliques ne nous seront pas rendu et nous allons devoir vivre avec cette idée. Nous allons devoir recréer une nouvelle vision, de nouveau rêves, de nouveaux espoirs pour le futur en acceptant que peut être, certaines personnes n’y assisterons pas ou qu’elles ne se passeront pas là ou nous l’avions espéré.
Parce que à vingt ans nous sommes à des moments clés de nos vies: le Post Master en fait partie.
Bien sur, il faut voir le verre à moitié plein mais il faut se rendre à l’évidence:
Notre fin d’étude a un gout amer lorsque qu’elle n’est pas fêtée comme il se doit
Notre rentrée sur le marché du travail a été une telle galère, qu’elle nous a laissé désorienté.e.s, déçu.e.s et désabusé.e.s
L’entrepreneuriat n’est pas une aventure aussi existante lorsque tous les marchés et secteurs d’activités sont à l’arrêt ou au ralenti.
Combien d’entre nous on fini par prendre un job alimentaire par manque d’emploi dans leur branche ? Combien sont aujourd’hui sous-payé.e.s par des employeurs frileux d’offrir des conditions décentes à des jeunes diplômé.e.s face à une situation économique instable ? Combien vivent encore chez leur parants parce qu’ils.elles ont du choisir entre indépendance et travail de sens ?
Ces réalités reflètent bien la réalité vécue par notre génération vivant une période clé de nos vie dans un contexte socio-économique instable et incertain.
Conséquences sur notre santé mentale
Bien sur, cette situation ne nous a pas laissé indemne.
Déjà pendant la pandémie, nous n’avons pas tous et toutes vécu la crise dans les mêmes conditions. Un enfermement obligatoire n’est ainsi pas la même chose dans une maison de campagne avec jardin et dans une chambre du CROUS à 14m2.
Ensuite, la fatigue a accentué les doutes les angoisses.
Une enquête réalisée par Ipsos pour la Fondation FondaMental a ainsi révélé l’état plus que préoccupant de la santé mentale des 18-24 ans pendant et après la pandémie. Publiée le 28 janvier 2021 dans le Parisien, celle-ci indique ainsi que, parmi un échantillon national de 404 jeunes:
32% des 18-24 ans ont un trouble de santé mentale (+11 points par rapport à l’ensemble de la population)
40% rapportent un trouble anxieux généralisé (+9 points par rapport à l’ensemble des Français)
Presque 3 jeunes sur 10 ont pensé qu’il vaudrait mieux qu’ils soient morts ou ont songé à se blesser
Observés dès le début de la pandémie, ces troubles n’ont que peu décru depuis, au contraire, une majorité de 18-24 ans continuent de vivre avec aujourd’hui encore. Ajoutez à ceci la situation géo-politique mondiale et l’instabilité économique, difficile aujourd’hui de retrouver la sérénité.
Alors comment retrouver des perspectives ?
Dès la semaine prochaine, nous entrons dans la suite de cette série Post Master avec enfin, des pistes à explorer pour solutionner notre Post Master Made in 2022.
Il sera question dans un premier temps de retrouver le sens; dans ce nouveau rôle social – comme salarié.e ou comme entrepreneur.se -, dans cette nouvelle dynamique de vie, mais également face au champs des possibles qu’ouvre cette nouvelle étape.
Et toi, comment fait-tu pour réaliser ton Post Master avec sérénité malgré les conséquences de la pandémie sur ta vie ?
Nous arrivons à la fin de ce second épisode de ma nouvelle série d’article Post Master. J’espère que celui-ci vous a plus. Je suis curieuse de savoir quelle est votre expérience cette période si unique dans l'histoire de notre société moderne et ses conséquences sur votre Post Master, n’hésitez pas à me partager votre vécu et vos réaction sur les pages LinkedIn et Instagram de @regardsleblog.
En attendant, je vous souhaite une belle fin de semaine et vous dis à la semaine prochaine pour un nouvel article
Je te peux pas compter le nombre de fois ou j’ai entendu: « Tu as les capacités, fais des études ! » et honnêtement cela m’allait bien. Mais cette injonction à faire des études, parce que « Tu en as les moyens » ou partie que « C’est le mieux à faire pour réussir sa vie », m’a empêché tout regard critique sur cette démarche.
Soyons clair, je ne regrette aucunement d’avoir fait des études « longues », bien au contraire … Si cela dépendait de moi j’aurais même continué longtemps, avec un second Master et la thèse reste dans un coin de mon esprit. Néanmoins, avec un peu de recul, je ne peux m’empêcher de penser à toutes ces injonctions extérieures qui ont guidé mon parcours universitaire:
Les études courtes sont pour ceux et celles qui n’ont pas le niveau scolaire
Les domaines scientifiques sont plus porteurs
La sélectivité des universités rend plus attractifs vos diplômes
Les activités parallèle à vos études sont un atout clés pour un potentiel recrutement
L’internationalisation des parcours est accessible à tous et toutes
Je vais m’arrêter là car la liste est longue.
Quoi qu’il en soit ces injonctions, souvent mensongères, nous guident vers un parcours plus raisonnable que raisonné, qui freine nos rêves, ambitions et désirs au profit d’une vision « réaliste ».
Cette vision est souvent guidée par les peurs. De nos ainé.e.s, de nos enseignant.e.s, des économistes et conseiller.e.s d’orientation. Tous et toutes auront tendance à nous amené vers la sécurité commune plutôt que vers l’accomplissement personnel, souvent au péril de nos envies premières.
Alors les études sont-elle faites que pour nous faire rentrer dans le moule ?
J’espère que non et plus encore, j’ose croire qu’elles peuvent nous amené à développer un certain regard critique (le fameux « Je pense donc je suis »), plutôt que de nous brider. Néanmoins, elle nous entraînent là ou on a besoin de nous et pas forcément là ou on veut aller …
Et après ?
Parce que si nous réussissons coûte que coûte à suivre notre quête personnel tout au long de nos études, il y a quand même des grandes chances que l’entrée dans « la vie active », nous fasse doucement revenir sur le droit chemin.
Quel est le prix de notre indépendance ?
C’est vraiment la question clé de mon année Post Master. Comment allier travail épanouissant et rémunérateur, sans perdre le sens ? Parce que maintenant mes études terminées, je me dois de voler de mes propres ailes. Une indépendance qui va d’ailleurs me permettre de prendre mes propres décision en conscience, loin des injonctions parentales.
Mais l’indépendance financière est-elle réellement accumulante avec désir de sens en Post Master ?
Il suffit de voir les grilles de salaire et de participer à quelques entretiens pour voir que c’est loin d’être évident. Parce que les expériences bénévoles et de stage sont loin d’être valorisées à traitement égal avec des contrats salariés, les jeunes diplômé.e.s sont considéré.e.s comme « sans expérience » et sans expérience, la rémunération est tout de suite plus faible …
En faisant des études, en France aujourd’hui, nous avançons avec cette certitude que ce graal nous donnera un pass VIP vers notre vie professionnelle rêvée, qu’elle soit salariée, entrepreneuse ou fonctionnaire. Pourtant ces attentes sont difficiles à atteindre et nous pouvons même arriver à nous demander si elles sont vraiment atteignables aujourd’hui. Bac + Master = vie professionnelle épanouis, un mirage aujourd’hui ?
Et toi, as-tu ressenti des injonctions sociales au moment de faire tes études ou te rentrer dans la vie actives ? Lesquelles ?
Projections parentales
Je ne pouvais pas parler du Post Master sans m’arrêter sur les projections parentales.
Parce qu’après avoir validé mon Master je pensais sincèrement avoir coché toutes les cases: parcours scolaire irréprochable, études supérieures réussies avec brio, engagement associatifs à foison en parallèle et expériences internationales dans mon sac à dos, comme cerises sur le gâteau.
Pourtant, lorsque j’ai compris que je pourrais pas vivre de mes activités en freelance et que le lancement de mon entreprise nécessitait des fonds financiers que je n’avais pas, j’ai du me rendre à l’évidence: indépendance et épanouissement professionnel n’allaient pas rimer tout de suite.
Alors j’ai commencé à chercher du travail. En Background mes parents étaient plus excité.e.s que moi et y aller chacun.e avec leurs petits critères: dans la région, salaire à 1600 net minimum, sans déplacements fréquents, plutôt dans la fonction publique …
J’ai essayé un nombre incalculable de refus, enchainé les interviews, puis trouver le graal (en tout cas en apparence): j’avais un premier CDD !
La fierté de mes parents étaient égale à la hauteur de mes doutes mais j’ai foncé: à moi l’indépendance financière !
Sommes nous un génération de sens ?
C’est vraiment une question qui me taraude lorsque j’échange avec ceux et celles de ma génération. Parce que ce modèle: études Bac+5, CDD, CDI (ou titularisation) ne nous fais plus rêver. J’irais même au delà, pour beaucoup il nous débecte.
Pourquoi cette quête assoiffée ?
Cette fois encore je crois que nous la devons à nos parents. Parce que nous les avait vu trimer, essayer les licenciement, les fermetures économiques, les managers sadiques et les heures supplémentaires non rémunérées. Nous les voyons aujourd’hui se battre pour des retraites, comme un fin en soi après des années de labeur. Parce que le travail, au sens de torture, pour beaucoup ils.elles l’ont connu.
Et si nous étions surtout censé.e.s ?
En refusants ce modèle, je crois que nous cherchons surtout à vivre ici et maintenant. À nous épanouir dans des jobs passions, plutôt que dans des jobs prisons, quitte à revoir nos modes de vie à la baisse.
Génération crises donc génération essentialiste ?
Avouons le, nous avons déjà vécu beaucoup trop de crises à 20 ans, sociales, économiques et sanitaire:
Génération attentats
Génération gilets jaunes
Génération sacrifiée (COVID)
Génération récession
Génération fin du monde (crise écologique)
Et si au milieu de toutes ces angoisses, nous avions trouver une besoin urgent de vivre ici et maintenant ? Voilà peut-être d’ou vient cette quête de sens, si éloignée des projections de nos parents.
Le sens pour faire face à la fatalité, une belle parade finalement, non ?
Ça te parles quand je te dis projections parentales ? Es-tu plutôt team sécurité de l’emploi ou quête de sens acharnée ?
Nos propres limites
Enfin, nous arrivons au face à face avec nous même.
C’est la difficulté principale avec les sauts dans le vide, ils nous renvoient souvent devant nos plus grandes peurs; celles que l’on garde bien au chaud au fond de notre inconscient et qui viennent rappeler leur existence lors des soirs d’angoisse.
C’est ainsi qu’il est facile de répondre finalement à l’appel de la sécurité, du CDD, surtout lorsqu’il s’agit de pouvoir manger. Il est facile de se complaire dans une routine finement orchestrée, même quand celle-ci pompe notre énergie, nos rêves et nos envies. Enfin, il est facile de suivre le chemin tracé, par la société ou nos cher.e.s parents, quitte à y perdre notre âme d’enfant.
Je suis la première à mettre résigné à un moment donné. Parce que finalement c’était peut être ça la « vie d’adulte »: de la résignation. Peut-être qu’avoir des enfants un jour suffira pour combler le vide de mes rêves de petite fille abandonnés, gentiment rangés derrière l’appartement mal isolé et le CDD bancal que j’avais réussi à obtenir.
Puis je me suis rappelée de mes cours de philosophie au lycée qui m’ont apprise le Je et le Ici et maintenant. Je me suis rappelée de mes cours de Littérature classique à la Fac qui m’ont appris la beauté des mots et la force de l’art. Je me suis rappelé de mes cours de Pédagogie inclusive en Master qui m’ont guidé vers la professionnelle que je voulais être.
Je me suis rappelé que mes études m’avais donné la théorie et qu’il était grand temps que je la mettre en pratique.
Vous comme moi, nous mettrons peut être des années à réussir à allier indépendance financière et épanouissement professionnel, mais nous devons tendre vers cela. Pas seulement pour la société ou pour les autres, mais parce que nous le devons à nos rêves d’enfants.
Je crois que c’est la richesse de notre génération, qui vit aujourd’hui le Post Master; nous allons devoir nous réinventer perpétuellement pour trouver notre place dans un monde qui vit à deux cent à l’heure.
Cela ne sera pas facile, mais cela nous permettra de repousser nos propres limites et d’éviter de nous laisser emporter par le flot continu de peurs, de doutes et de colères qui plane dans l’air. Un flot créé et dirigé par les générations qui nous ont précédé et qui ont vécu tourné vers le futur, en oubliant de prendre soin d’eux.elles et de notre planète, ici et maintenant.
Je crois que c’est ce que nous ne devons pas oublier pour poursuivre notre chemin, pendant nos études, notre vie active et même après: l’avenir s’écrit dans le jour qui se cueille (Carpe Diem). Vivre aujourd’hui c’est préparer son avenir et si celui-ci doit être amené à changer alors ainsi soit-il mais que cela vienne de nous d’abord.
De toute façon: ta vie, tes choix.
Et toi, c’est quoi les limites que tu te met aujourd’hui dans tes choix professionnels et personnels ?
Nous arrivons à la fin de ce second épisode de ma nouvelle série d’article Post Master. J’espère que celui-ci vous a plus. Je suis curieuse de savoir quelle est votre expérience sur ces freins, de vous-même et des autres, n’hésitez pas à me partager votre vécu et vos réactions sur les pages LinkedIn et Instagram de @regardsleblog.
En attendant, je vous souhaite une belle fin de semaine et vous dis à la semaine prochaine pour un nouvel article.
Pendant mes cinq ans d’étude, comme la majorité des étudiant.e.s, j’ai foncé tête baissée. Entre dossiers, oraux, mémoires, il faut dire que je n’avais pas vraiment de temps pour penser. Sans parler de la vie quotidienne, entre jobs étudiant, colocations animées et sorties entre ami.e.s.
L’avenir ? Il semblait tracé.
Depuis la fin mon Master 1 et à la suite d’une dizaine de stages réalisés entre ma seconde et mon Master, j’avais choisi l’entrepreneuriat. Pour la liberté d’action, pour pouvoir explorer mon plein potentiel entrepreneurial et enfin pour pouvoir vraiment faire bouger les choses dans mon secteur passion: l’éducation. Mais au delà de ce projet, mon avenir était assuré:
Mon Master offrait de nombreux débouchés.
Dans les ONG, les institutions d’état, les associations, partout nous étions attendu pour manager des projets en éducation, accompagner les enseignant.e.s dans la mise en place de pédagogies adaptées, développer des solutions numériques éducatives cohérentes et adaptées.
Avec de la volonté et de l’énergie, le monde était à nous.
Alors quand la crise sanitaire a freiné mon projet entrepreneurial, quand j’ai compris que le Ministère de l’éducation nationale était une forteresse presque infranchissable pour les jeunes innovant.e.s et que j’ai du chercher un poste pour survivre financièrement:
Je suis tombée de haut.
Non seulement nous n’étions pas attendu.e.s, mais en plus nous n’étions pas ceux/celles qu’ils.elles attendaient. Pas suffisamment expérimenté.e.s, trop jeunes, très mal renseigné.e.s et préparé.e.s. Mes premiers mois de quête ont été lunaires. Je ne comprenait rien; ce n’était rien de ce que l’on m’avait dit.
Pourquoi un tel Gappe ?
En lançant cette nouvelle série d’articles, je souhaite questionner un fonctionnement en péril et tenter de comprendre: Pourquoi l’entrée dans la vie active est-elle aujourd’hui si difficile pour les jeunes diplômé.e.s Bac+5 ? Pourquoi les entreprise, les institutions, les pépinières entrepreneuriales et nous semblons être sur un créneau horaire si différent ? Pourquoi les universités ne nous préparent-elles pas vraiment à la cage au lions ?
J’ai ma petite idée sur cette dernière question mais vous, qu’en pensez vous ?
Comment avec-vous vécu votre Post Master ?
Et après ? Attente VS Réalité
Entrepreneuriat: vous n’êtes pas suffisamment stable financièrement
L’entrepreneuriat c’est le nouveau Everything Is Possible. Depuis l’essor de la Startup nation sous la première air Jupiter, l’entrepreneuriat est devenu un voie à part entière dans une carrière professionnelle. Pour les trentenaires en quête de sens, les cinquantenaires en reconversion et les jeunes diplômés avides d’innovation et d’indépendance.
Pour moi aussi l’entrepreneuriat est devenue un Goal. Pace que je suis de nature entreprenante. Parce que depuis toujours je mène en permanence trois projets de front. Parce que j’ai cru très fort au crédo: je l’ai fait donc tu peux le faire aussi.
Je n’ai pas abandonné mes rêves d’entrepreneuriat, parce que crois toujours que c’est un modèle qui me correspond. Ceci étant dit, il est tant de dire la réalité: l’entrepreneuriat n’est pas pour tout le monde, à tous moments. Pour se lancer il faut des fonds. Pour se lancer il faut une connaissance de son secteur d’activité, une certaine expérience et un réseau. Pour se lancer il faut se sentir légitime de le faire et donc être bien entouré.e.
Sans cela, la grand saut vers l’entrepreneuriat risque surtout de rimer avec une belle chute, épique et douloureuse. Parce que si l’on apprend bel et bien de ses échecs, cela ne les empêche pas de faire mal, voir très mal.
Pour quel résultat ? Surtout, ces blessures là n’étaient-elles pas évitables ?
Entreprises: vous n’avez pas suffisamment d’expérience
Au bout d’une cinquantaine de CV déposés au grès de mes recherches acharnées, j’ai commencé à me poser des questions. Moi qui était si fière de mon parcours universitaire singulier et internationale, moi qui mettait tant d’énergie dans mes investissements associatifs, mon blog et mon podcast, moi qui venais d’être reconnue comme major de promo, je ne comprenais pas.
Fière de mon identité professionnelle finement travaillée, je ne comprenais pas pourquoi ces dizaine et dizaine de mails sans réponses, ces entretiens décrochés au prix d’une rage acharnée soldés par des échecs enchaînés. La raison était simple: je n’étais pas l’employée qu’ils.elles recherchaient.
Trop jeune, ils.elles ne faisaient pas confiance à ma fougue jeunesse. Pas suffisamment expérimentée, ils.elles refusaient de prendre en considérations mes 11 stages en 7 ans, mes 52 articles en 5 ans et mes 2 expériences de responsable d’antennes associatives. Dans tous les cas cela ne fonctionnait pas, pire les points présentés pour justifier leur rejet ne dépendaient pas de moi.
Je ne vais pas prendre en âge plus vite que le temps le permet et j’avais déjà tout fait pour démultiplier les expériences et ainsi étoffer mon CV, en plus de mes études et jobs étudiants. Un grand poète (pourtant aussi jeune) a écrit ainsi un jour J’avais vingt ans. Je ne laisserai personne dire que c’est le plus bel âge de la vie (Paul Nizan). Je ne peux qu’être d’accord. 20 ans c’est la fin des illusions d’enfants et l’entrée dans le monde des « grands », un monde qui visiblement à oublié de fair rimer ambition avec bienveillance …
Qui y perd le plus ? La jeunesse engagée ou les ainées désillusionnés ?
Institutions: vous allez devoir revoir vos prétentions à la baisse
Enfin, il y a les institutions. Dans le secteur de l’éducation elles sont très nombreuses, à tous les niveaux: étatique, régionaux, départementaux, locaux. Les institutions, notamment en éducation, ont une place particulière dans mon coeur. Parce que j’ai été une élève, puis une étudiante, du système éducatif public. Parce que c’est grâce à ce système que j’en suis ou j’en suis et que j’en ai bien conscience. Parce que la majorité des pays du monde et même des pays occidentaux sont loin, très loin, d’avoir un système éducatif public aussi qualitatif que celui de la France.
Maintenant, c’est un système qui se détériore. Entant qu’étudiante je n’en ai eu que très peu conscience de cette chute libre. Ayant enchainé des établissements de secteurs, des formations sélectives, avec des petits groupes de travail, des échanges internationaux, je n’avait pas compris l’ampleur du phénomène.
Lorsque j’ai commencé à chercher du travail, ce sont les universités qui semblaient être les premières opportunités pour mon profil d’ingénieure/ conseillère pédagogique. A l’époque, je ne connaissais pas grand chose au monde travail, à la question de la valorisation salariale, des conditions de travail, des perspectives d’évolutions. Aujourd’hui, je connais les CDD contractuels projets d’un an. Rémunérés au minimum et exclu des primes, des évolutions de carrière et très peu valorisés.
Je reviendrai un autre jour sur la réalité du poste d’Ingénieur.e pédagogique à l’université parce que entre le manque de reconnaissance, le système universitaire élitiste et dirigé par et pour les enseignant.e.s chercheur.se.s, il y a des choses à dire.
Comment peut-on croire que l’égalité des chances peut fonctionner quand les rouages de ce système sont rouillés par les inégalités ?
Salariat, entrepreneuriat: l’heure des désillusions
Promis, la suite de cette série sera plus optimiste, mais il faut d’abord passer par là. Parce que sincèrement, Désillusion est le mot qui représente le plus mon Post Master et je sais que je suis loin d’être la seule.
Comme je viens de le présenter, je nous trouve très mal préparé.e.s en Master à la vie professionnelle qui en découle et ce autant pour le salariat que pour l’entrepreneuriat.
Voici une liste non exhaustive des cinq essentielles que nous devrions apprendre à mon sens pour pouvoir se lancer dans l’entrepreneuriat en Post Master:
Connaitrela valeur de son travail (symbolique et financière)
Pouvoirfixer un prix sur ses prestations et produits
Savoirnégocier avec de potentiels fournisseurs
Communiquer sur les réseaux sociaux et via des interfaces publicitaires
Pitcher son projet, ses services, ses produits, en s’adaptant aux circonstances et publics
En faisant un Master entant qu’étudiante entrepreneurs, accompagnée par le Pépite, j’ai pu apprendre certains de ces éléments, en tout cas bien plus facilement que la majorité des étudiant.e.s. Néanmoins, cela n’a pas été suffisant pour me permettre de pouvoir vivre de mes missions de freelance ou pourvoir créé ma société en toute sérénité. Manque d’accompagnement ou de compétence, l’avenir me le dira peut-être …
Et toi qu’en penses-tu ? Qu’aurait-tu voulu apprendre pour pouvoir te lancer en entrepreneuriat en Post Master ?
Pour poursuivre dans ce sens, voici une liste non exhaustive des cinq essentielles que nous devrions savoir à mon sens au moment de se lancer dans le salariat en Post Master:
Valoriserses expériences et diplômes
Se positionner par rapport aux attentes de l’employeur et de l’entreprise/institution visée
Faire un CV et une Lettre de motivation adaptés et représentative de notre objectif salarial
Se positionner sur ses prétentions salariales, par rapport à son expérience et au poste
Négocier ses conditions de travail (congés, complémentaire, transports, télétravail…)
Pendant les trois premiers mois de recherche, je n’avais aucun de ses éléments et je me suis sentie très seule … Heureusement j’ai croisé le chemin de l’APEC (Association pour l’emploi des cadres), une association formidable et adaptée qui accompagne les jeunes diplômé.e.s en recherche d’un premier emploi: gratuitement et à travail un accompagnement personnalisé.
Et toi qu’en penses-tu ? Qu’aurait-tu voulu savoir au moment de te lancer dans le salariat en Post Master ?
Nous arrivons à la fin de ce premier épisode de ma nouvelle série d’article Post Master. J’espère que celui-ci vous a plus. Je suis curieuse de savoir quelle est votre expérience de cette période si particulière, n’hésitez pas à me partager votre vécu et vos réaction sur les pages LinkedIn et Instagram de @regardsleblog.
En attendant, je vous souhaite une belle fin de semaine et vous dis à la semaine prochaine pour un nouvel article.
L’inclusion scolaire des élèves avec Troubles du Spectre Autistique en France
Parmi le concept de l’école inclusive, nous avons longtemps parlé en priorité des élèves en situation de handicaps, physique ou mentaux. Les troubles du neuro-développement ne sont intervenus que très récemment dans l’équation, notamment en France. En souhaitant vous parler spécifiquement de l’inclusion des élèves avec TSA, il s’agit pour moi de pointer les failles du système inclusif, basé sur des protocoles généralisés, pauvres en moyens, humains, financiers et matériels. Un système qui peine d’autant plus face à la diversité des spécificités et des difficultés liées aux TSA.
Ce sixième épisode est une fois de plus documenté, puisque issu de mon Mémoire de recherche. Néanmoins, cette fois, j’ai souhaité m’appuyer en priorité sur des acteur.trice.s de terrain. Dans ce cadre, j’ai réalisé deux entretiens avec Marie Toullec, chercheuse en Sciences de l’éducation et professeur à l’INSHEA de Nantes et Valérie Gauzé, bénévole au sein de l’association Autisme Pau Béarn et maman d’un enfant autiste, afin de connaitre leurs expertises et leurs expériences de l’école inclusive tournée vers les élèves avec TSA en France.
Une scolarisation récente
En France, la scolarisation des enfants avec TSA est une histoire récente qui remonte à une trentaine d’années. Auparavant, cette population se trouvait incluse dans la catégorie des maladies mentales et donc généralement hospitalisée en hôpital psychiatrique (lorsqu’il y avait diagnostiqué). Il faudra attendre les années 1980 pour que, sous la pression des associations de parents, une scolarisation en milieu ordinaire dans des classes dites intégrées soit envisagée. Cette scolarisation se poursuivra dans les Clis et les UPI (transformées en Ulis) puis dans les établissements spécialisés dans les années quatre-vingt-dix, et enfin en inclusion dans les classes ordinaires des écoles et des collèges, à partir des années 2000.
C’est notamment le psychologue américain Eric Schopler et le programme Teacch, diffusé en France dans les années 90, qui a marqué cette période de transition, entre maladie psychiatrique et trouble neurodéveloppemental. Spécifiquement, dans les classifications internationales, c’est la notion de « trouble envahissant du développement » qui est choisie comme catégorie et a permis par le suite au chercheur.se.s de débuter leur travail de recherche, en quête de solutions pédagogiques de prise en charge.
Méthode Teacch
Parmi ces chercheur.se.s, E. Shopler va développer la méthode Teacch – Traitement and Education of Autistic and related Communication Handicapped Children – afin de proposer une méthode complète d’accompagnement des enfants avec TSA, basée sur l’éducation. Il s’agit, pour l’époque, d’une méthode complètement innovante puisqu’elle exclue tout soins médicaux, pour se baser sur une approche psychothérapique. En s’adaptant au profil de chaque enfant, elle obtient rapidement l’adhésion des parents et familles d’enfants et adolescent.e.s avec TSA rapidement. Néanmoins, il est à noter que la méthode Teacch, tout la méthode ABA qui va venir par la suite, va rester en périphérie du système éducatif classique, frileux de telles innovations. Ce sont donc surtout les établissements privés sous contrats, souvent considérés comme « alternatif » qui vont l’utiliser et qui l’utilisent encore aujourd’hui.
En parallèle, il faut attendre 1996 pour qu’un additif à la loi de 1975 fasse ressortir l’autisme des « maladies mentales évolutives » dans la loi française. Cette reconnaissance de l’autisme comme un handicap à part entière va permettre d’orienter plus facilement les familles vers le secteur médio-éducatif, chargé de faire le lien entre monde médical et milieu scolaire. C’est également la mobilisation des parents et familles qui va permettre l’ouverture, en 1985, de la première classe intégrée pour enfants autistes en école publique, dans la vallée de Chevreuse, à Bures-sur-Yvette. D’autres classes ouvrirons par la suite dans des écoles volontaires, malgré le scepticisme poignant de la population, encore largement gangrénée par des années de classement en maladie psychique.
Mobilisation des parents et familles
Dans la dernière décennie, la mobilisation des parents et familles n’a pas flanché en France, à laquelle s’est ajouté une certaine reconnaissance médiatique des personnes autistes, notamment pour leurs exploits sur le terrain scientifique. C’est en particulier le syndrome d’Asperger, connu comme étant une forme d’autisme à haut potentiel intellectuel, qui a permis de faire basculer l’opinion publique. Ainsi le film Rain Man a eu un grand retentissement dans notre société. Il a contribué aussi à faire évoluer notre représentation de l’autisme. L’acteur Dustin Hoffman y a interprété un autiste dans le milieu du spectre autistique, avec ce que Laurent Mottron appelle « des pics de compétence », qui n’avait rien à voir avec la représentation restrictive de de l’autiste replié sur lui-même et ne communiquant pas avec son entourage.
Aujourd’hui, il existe en France une cinquantaine de classes spécialisées autisme, ouvertes plutôt dans les écoles primaires et secondaires, à l’initiative des parents pour la majorité d’entre elles. En plus de la méthode Teacch, d’autres outils ont vu le jour comme le PECS (Système de communication par échange d’images) et l’ABA (Analyse appliqué du comportement). Malgré le fait qu’elles suscitent encore de nombreuses critiques du côté de certains chercheur.se.s français.e.s, ces méthodes restent nécessaire à l’appréhension des TSA en milieu éducatif.
Un modèle d’accompagnement individualisé
La problématique de formation des professionnel.le.s éducatifs est au cœur de la question de la scolarisation des élèves avec TSA, comme me le confirmait la chercheuse Marie Toullec en mai dernier :
« Entre 2005 et 2018 le nombre d’élèves en situation de handicap scolarisé.e.s a été multiplié par 3 et le nombre d’élèves en situation de handicap accompagné.e.s (AESH) a été multiplié par 6 donc il y a une demande exponentielle d’accompagnement humain. Mais en même temps, la France se laisse piéger ou se laisse prendre à son propre piège, puisqu’elle a envisagé l’accompagnement plutôt individuel. On pouvait donc d’attendre à ce que cette demande explose et finisse pas poser un problème au système qui n’est pas fait pour faire face. C’est-à-dire qu’au lieu de mettre en place un système d’accompagnement des enseignements, c’est à dire dans toute classe de faire en sorte que l’enseignant soit accompagné d’un.e personne référente, un peu comme ça se passe en Italie, la France a choisi de faire accompagner les élèves individuellement ».
Cette question d’un choix de modèle « individualisé », fonctionnant notamment grâce à la présence des AESH reste sensible notamment auprès des associations de parents d’élèves avec TSA, dénonçant une prise en charge à deux vitesses. En effet, celle-ci induit la fermeture accélérée des IME, allant à sens inverse du système d’école inclusive pour le gouvernement, mais pourtant nécessaires dans la prise en charges d’élèves avec des handicaps lourds (dont certaines formes d’autismes).
L’inclusion à tout prix
Ainsi, après l’apparition de la notion de « scolarisation » dans la circulaire du 8 mars 2005, l’état est venu substituer la notion « d’obligation éducative » [Loi du 30 juin 1975], en annonçant le droit de chaque élève de pouvoir bénéficier d’un enseignement, adapté à ses besoins et capacités. Cette nouvelle modalité de scolarisation a obligé les établissements scolaire à travailler en réseaux avec, notamment, les de nombreux professionnel.le.s médico-sociaux (psychologues, psychothérapeutes, ergothérapeute…), par le biais de des MDPH et des associations notamment.
Ce travail en collaboration est régi en France par de nombreuses conventions et documents administratifs, comme me le précisait Valérie Gauzé, bénévole au sein de l’association Autisme Pau Béarn et maman d’un enfant autiste, lors de notre échange téléphonique en mai dernier. Ces nombreuses démarches administratives freinent la prise en charge des élèves avec TSA et continuent de ralentir leur véritable « inclusion scolaire ». Une nouvelle spécificité administrative française, loin d’être enviée par nos voisins européens …
Afin continuer votre exploration sur la situation de l'école inclusive en France, je vous propose la lecture de deux Revues scientifiques très complètes, publié par l'INSHEA :
- SCOLARISATION DES ÉLÈVES AVEC AUTISME EN FRANCE : TRENTE ANS D'HISTOIRE… Christine Philip I.N.S.H.E.A. | « La nouvelle revue de l'adaptation et de la scolarisation » 2012/4 N° 60
- LA SCOLARISATION DES ENFANTS AYANT UN TROUBLE DU SPECTRE DE L'AUTISME PAR L'INTERMÉDIAIRE DU SOUTIEN AU COMPORTEMENT POSITIF Thiago Araujo Lopes, Mélina Rivard, Diane Morin, Jacques Forget I.N.S.H.E.A. | « La nouvelle revue de l'adaptation et de la scolarisation » 2012/4 N° 60
Je vous invite également à écouter ou réécouter les épisodes de mon podcast Voix d'école*, donnant la parole à ceux et celles qui font l'école aujourd'hui, le 7ème épisode vient tout juste de sortir ! :
https://voixdecole.podbean.com/e/voix-d-ecole-n°7-bonus-2-un-concept-en-bref-les-troubles-du-neuro-developpement/
*Deezer, Spotify et Apple podcast
La prise en compte des élèves avec TSA est difficile en France et démontre bien, à mon sens, les limites d’un systèmes éducatif inclusif. Chaque élève avec TSA demande un accompagnement spécifique en fonction de sa neuroatypicité, ce qui limite les protocoles de prise en charge, au coeur de notre système français. De plus, le recourt aux AESH, sous fond d’un Accompagnement personnalisé demande énormément de moyens, humains, matériels et financiers, loin d’être une réalité au sein des écoles. Une fois de plus, si vous êtes intéressé.e.s par ma bibliographie et ma filmographie complète n’hésitez pas à venir vers moi, en commentaire, en MP ou par mail.
La semaine prochaine, je réfléchis à vous proposer une version courte de mon échange passionnant avec la chercheuse Marie Toullec, chercheuse en Sciences de l’éducation et professeur à l’INSPE de Nantes. Si vous souhaitez découvrir de nouvelles facettes spécifiques de l’école inclusive, n’hésitez pas à me faire part de vos idées en commentaires ou sur les réseaux sociaux du blog.
Si vous êtes un.e professionnel.le.s de l’éducation et que vous portez un projet d’école inclusive ou que vous souhaitez en être, n’hésitez pas à nous partager vos projets, idées et envies en commentaire ou sur les réseaux sociaux du blog: LinkedIn, Instagram, Facebook. Votre Regard est ici au coeur de tout !
L’école inclusive au Canada: autorités éducatives, recherches universitaires et culture inclusive
Nous continuons aujourd’hui à dé-zoomer notre Regard sur l’école inclusive en traversant l’Atlantique. Lorsque l’on parle d’école inclusive, mais également du bien être à l’école ou encore des pédagogies alternatives, le Canada arrive très rapidement comme système de référence. En effet, chez nos amis franco-anglophones, l’éducation est au coeur des préoccupations, sociales, politiques et universitaires depuis plusieurs années. Un intérêt qui leur a permis, vous allez le voir, d’intégrer à leurs systèmes éducatifs des éléments fondamentaux de l’école inclusive, tour d’horizon …
Si l’épisode 4 vous proposez déjà une vision bien différente, historique, sociale et politique, le gap est ici d’autant plus grand. Le Canada est un pays d’Amérique du Nord, ne l’oubliez pas, un pays immense par ailleurs, qui jongle entre une multitude d’identités culturelles, américaines, françaises, autochtones … Cette diversité rend d’autant plus essentiel l’aspect inclusif des systèmes éducatifs ! Comme pour les épisodes précédents, j’ai nourri cet épisode à travers de nombreuses recherches, lecture d’ouvrages scientifiques et projections de documentaires, vous pourrez retrouver certaines références en fin d’article.
Une culture inclusive déjà installée
Contrairement à la France, la « culture de l’inclusion » est arrivée au Canada il y a plus de 40 ans, notamment avec le rapport One Million Children; un appel à la société canadienne pour l’inclusion, à l’époque, centrée sur les enfants en situation de handicap. Les acteurs de l’éducation demandaient alors déjà un nouveau système d’éducation passant tout d’abord par une amélioration du système de formation des enseignant.e.s ainsi qu’un respect égal pour les enfants porteurs de handicapes à celui donné aux enfants dit « normaux ».
Dès lors, le système canadien éducatif s’est basé sur l’idée que tous les enfants devraient apprendre ensemble et ce « indépendamment de leurs caractéristiques particulières ». Des pratiques plus inclusives ont donc été encouragées, reposant sur la présence d’une « culture de changement au sein des écoles », ainsi que sur la transformation de l’organisation scolaire et des représentations de la diversité à toutes les échelles, administratives, professorales puis parmi les élèves. Un changement global, au niveau politique et social, qui avait pour but d’entrainer une évolution des pratiques et des savoirs des anciennes générations et la création d’une nouvelle société plus inclusive.
En prenant conscience de la complexité de ce processus, la société canadienne a associé aux aspects opérationnels des chercheur.se.s, chargé.e.s d’étudier l’évolution des pratiques et de proposer différents modèles alternatifs. On peut citer notamment l’étude du Docteur Moreau (2010), s’intéressant au rôle de leadership exercé par la direction des écoles dans le processus d’inclusion ou encore celle des Docteurs Garbo et Albanese (2006) sur l’importance de la formation initiale des enseignants pour la réussite de modèle inclusif dans le système scolaire.
Le Canada est reconnu pour son système éducative et ses avancées en matière de recherche sur le sujet ; le système éducatif français (pays historiquement social) est lui omniprésent sur la scène internationale (notamment par les établissements français à l’étranger), alors qu’est-ce-qui explique cette différence de 40 ans dans la prise en compte de la notion d’inclusion ?
Une différence historique d’abord sans doute. L’école française est vieille, comme l’Europe le vieux continent, elle est issue d’une tradition classique, religieuse, judéo-chrétienne, avec en son cœur un système du maitre (figure d’autorité) et des élèves (apprenants passifs), empêchant l’échange libéré prôné par la classe inversée canadienne. L’estrade et les tables à deux en bois ont laissé place aux tableaux numériques et tables individuelles plus moderne, mais le système reste le même. De plus, l’école française est divisée en deux, voire trois : les écoles publiques, les écoles privées en contrat avec l’état et les écoles privées hors contrat. Une division qui ne laisse pas beaucoup de place à la diversité et à l’inclusion.
Le Canada pour sa part, pays jeune d’Amérique du Nord basé sur une organisation libérale, riche d’une multi culturalité grandissante (l’immigration est toujours plus nombreuse chaque année), jouit d’un passif beaucoup plus faible, le libérant sans doute des contraintes traditionnalistes. Les grands principes d’inclusion, de liberté, de diversité ce sont facilement fait une place dans ce pays immense aux cultures et langues diverses, au sein d’une société en attente d’union. Ce sont donc ces valeurs qui ont uni, tôt. Puisque contrairement à la France il y avait tout à fonder, nous pouvons imaginer qu’il était plus simple d’intégrer l’inclusion.
Des autorités éducatives différenciés
Au Canada, les directives en matière d’éducation relèvent depuis toujours des autorités fédérales, des gouvernements provinciaux et territoriaux, ce sont donc ensuite ces instances qui se sont emparées du problème pour mettre en place des solutions concrètes. Ainsi, chacune des administrations publiques définissent les « besoins spéciaux » différemment, tout en se basant sur le Plan d’enseignement individualisé (PEI) utilisé dans l’ensemble du Canada. Selon la région on peut ensuite parler de plan de soutien individuel pour l’élève, plan d’inclusion et d’intervention, plan de programme individualisé ou encore de programme d’enseignement personnalisé, l’objectif reste le même et la responsabilité revient toujours au directeur ou à la directrice d’école :
« En Colombie-Britannique, en Alberta, au Manitoba, en Ontario, au Québec, en Nouvelle-Écosse, à l’Île du Prince-Édouard, à Terre Neuve-et-Labrador, au Nunavut, dans les Territoires du Nord-Ouest et au Yukon, le processus du PEi exige que l’élève soit d’abord évalué, ou autrement identifié, afin de déterminer ses forces pour ensuite adapter son programme d’éducation en conséquence. En Saskatchewan, une évaluation officielle est mentionnée dans la politique, mais une analyse holistique des besoins de l’élève devrait être menée pour déterminer ses besoins en classe. Au Nouveau Brunswick, le processus du Programme d’enseignement personnalisé (pEp) indique que l’élève peut recevoir des services même s’il n’y a aucune identification issue d’une évaluation formelle, mais on demande que soient fournis les résultats d’une évaluation informelle ou formelle dans le cas d’une demande de consultation pour un élève auprès d’une enseignante ressource et d’une équipe interne de services aux élèves ».
Une des principales limites de ce système tient à son financement. En effet, la plupart des administrations régionales allouent des fonds selon une formule de financement globale, son montant est alors fondé sur le nombre d’élèves soutenus (Ontario ou Yukon par exemple), le nombre d’établissements (Manitoba par exemple) ou arrondissements scolaires prédéfinis (Colombie-Britannique par exemple). Certains fonctionnements inégalitaires limitent les budgets des établissements spécialisés et donc ensuite le nombre d’embauches vers des professionnel.le.s adapté.e.s, creusant les inégalités entre les régions elles-mêmes.
Le fait que le système d’inclusion soit dirigé et organiser de manière différente à de grandes conséquences sur la prise en compte de la notion d’inclusion. Ainsi en France c’est le Ministère de l’Education Nationale qui vote et fait appliquer les lois et décrets en matière d’éducation, donnant ainsi à tous les établissements les mêmes programmes, politiques et budgets. Au Canada en revanche, la grandeur géographique du pays et la division politique en matière d’éducation par région, divisent. Chaque région jouit ainsi positivement, d’une plus grande liberté mais se doit de gérer son budget ; les choix politiques de chacun en matière d’éducation risquent alors de creuser les inégalités.
Il est intéressant d’observer cette différence de plus près quand on connait les critiques faites aujourd’hui au système français comme étant trop centralisé. Les régions demandent une plus grande liberté de mouvement qui leur permettrait de faire leurs propres choix en fonction de leurs besoins spécifiques. Or, c’est le choix qui a été fait par les dirigeants canadiens qui aujourd’hui dénoncent des inégalités budgétaires entre ces régions.
Il s’agit là d’un point central dans la problématique d’inclusion.
Comment organiser un système égalitaire, commun à tous.tes en prenant en compte les diversités et besoins spécifiques de chacun?
La Recherche en pôle centralisateur
Enfin, un point important pour moi dans le système canadien, le différenciant par ailleurs de ceux français et espagnol est la place donnée à la Recherche dans ce système en transformation.
Comme nous avons pu le voir, le Canada, dès le début de ses expérimentations vers une école inclusive,a donné une place aux chercheur.se.s en leur donnant la mission « d’étudier l’évolution des pratiques et de proposer différents modèles alternatifs ». Un choix judicieux qui a permis une prise de distance avec les choix politiques pris et un regard critique important dans l’évolution et la remise en question permanente de ces choix. En laissant une place aux chercheur.se.s dans ce processus politique, le Canada s’est assuré un filet de protection intéressant, rassurant l’opinion publique et légitimant ses actions sur la scène politique internationale (il est intéressant de relever qu’au début de ces expérimentations le pays était l’un des premier à faire ces choix).
Et la recherche française où est-elle ? Elle est présente bien sûr, mais en retrait. Pour preuve, il suffit d’observer le faible nombre de documents scientifiques français que l’on peut trouver sur le sujet (même en bibliothèques et librairies socialisées comme à France Education International), contre le nombre – très – important de documents canadiens du même genre ; la différence est flagrante. C’est un choix politique que de donner de l’importance à la recherche dans les décisions d’état, un choix qui n’est pas souvent fait en France. Pour illustrer mes propos, je peux bien sur relever la Loi sur la recherche du gouvernement d’Edouard Philippe de février 2019 dénoncée comme « précaire pour la recherche avec l’augmentation des contrats précaires » par les chercheur.se.s, professeur.e.s d’université et doctorant.e.s descendu.e.s en nombre dans la rue entre février et mars 2020.
Afin continuer votre exploration sur la situation de l'école inclusive au Canada, je vous propose la lecture d'une revue scientifique canadienne, datant de 2015, ainsi que la projection d'un débat international, organisé par l'INSHEA en 2013:
- Centre canadien de politique alternative (juin 2015) : « Invalidité et inclusion dans l’éducation canadienne : politique, procédure et pratique », sous la direction d’Helena Towle
- INSHEA, débat « L’inclusion scolaire : qu’en est-il ? » par Christine Philip, maitre de conférences à l’INSHEA
Je vous invite également à écouter ou réécouter les 6 épisodes de mon podcast Voix d'école, donnant la parole à ceux et celles qui font l'école aujourd'hui, le 7ème sort cette semaine ! :
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Le Canada est un pays et un système éducatif qui me tient à coeur, j’espère vous avoir fait comprendre pourquoi dans ce 5ème épisode … L’Ecole se doit d’être vu comme un système, au delà d’une simple institution, il s’agit de faire travailler ensemble des politiques, des chercheur.se.s, des acteur.trice.s de terrain. L’école inclusive ne peut devenir certaine sans ce travail de fond, demandant des investissements, humains, financiers, temporels.
Comme la semaine dernière, si vous êtes intéressé.e.s par ma bibliographie et ma filmographie complète n’hésitez pas à venir vers moi, en commentaire, en MP ou par mail.
Cette article clôture le cycle de Regards différenciés sur les systèmes inclusifs. Dès la semaine prochaine, je vous propose de revenir à ce qui fait l’Ecole inclusive en nous penchant sur le cas spécifiques des élèves avec TSA (Troubles du Spectre Autistique). Classés comme troubles du neuro-développement, les élèves avec TSA souffrent d’une mauvaise reconnaissance de leurs spécificités, rendant complexe leur inclusion en milieu scolaire ordinaire …
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L’école inclusive en France: politiques, réalité sociale et plans économiques
Après vous avoir exposé les bases de l’école inclusive, du concept d’inclusion à l’histoire éducative française, plus intégrative qu’inclusive, il est temps pour moi de parler de la situation actuelle, dans les écoles. Parce que si l’école inclusive est partout, dans les médias, les conseils internationaux et les ouvrages spécialisés, sur le terrain, c’est autre chose … Entre politiques théoriques et réalités sociales, le gap est immense et les budgets, pourtant importants, peinent à combler les manques pour favoriser véritablement une école français pour tous.tes.
Ce troisième épisode est une fois de plus documenté, puisque issu de mon Mémoire de recherche. Néanmoins, cette fois, j’ai souhaité m’appuyer en priorité sur des acteur.trice.s de terrain. Dans ce cadre, j’ai réalisé trois entretiens avec Marie Toullec, chercheuse en Sciences de l’éducation et professeur à l’INSHEA de Nantes, Christelle Laszczak, AESH et Julie Massonneau, Educatrice spécialisée, afin de connaitre leurs expertises et leurs expériences de l’école inclusive en France.
Le modèle éducatif français
Le modèle éducatif français est constitué autour de l’Etat centralisateur. Ce système n’a cessé de se perfectionner, de Napoléon, à Jules Ferry, tout en gardant pour terreau inchangé : l’élitisme. Ce système, fondé sur les concours, la sélection, les notes et classements, s’est imposé peu à peu sur l’ensemble du système éducatif construit pour y répondre, des Lumières à la République, pour arriver aujourd’hui à ce que l’on nomme l’Elitisme Républicain.
Parmi les diverses conséquences d’un tel système, la question de la ségrégation et de l’exclusion des élèves et des familles innapté.e.s à ce modèle, se pose. Innadapté.e.s, que ce soit à cause de difficultés d’apprentissage, d’illettrisme, de handicap, de problématiques sociales, médicales. Ces personnes « inadaptées », remettent en cause ce modèle dont elles sont exclues. Lors de notre entretien, le 4 mai dernier, la chercheuse en Sciences de l’éducation et professeur à l’INSHEA de Nantes, Marie Toullec, a pris le temps de revenir avec moi sur la construction de ce modèle ségrégatif :
« L’école française elle a toujours été Ségrégative. C’’est à dire qu’arrivait à l’école les élèves qui pouvaient suivre, ceux restant, soit ils restaient à la maison, soit ils étaient dans des institutions séparées de l’école. Ce modèle s’est poursuivi jusque tard, tout le 18e, tout le 19e Siècle, jusqu’à l’arrivée des premiers établissements spécialisés. Lors de l’ouverture de l’école aux classe dites spécialisée, ont été placé.e.s tous les élèves qui ne pouvait pas suivre dans des classes ordinaires ; ceux qui avait des difficultés, ceux qui présentaient des difficultés parce qu’ils avaient handicap, ce qui avait des problèmes de comportement … Ce fut le cas jusqu’à la fin des années 80, sous Jospin, qui était Ministre de l’éducation nationale ; en 1989, une loi fut votée. Les classes dites spécialisées sont devenus des classes d’intégration scolaire, c’est à partir de ce moment-là qu’est apparu le terme d’intégration. Le terme d’intégration représente le fait de faire en sorte qu’il y ait de plus en plus d’élèves intégrés dans le système éducatif dit classique. Il y avait donc cette idée que pour arriver dans l’école il fallait quand même être suffisamment ‘adapté’ à l’école. Pour cela, ont envoyé d’abord les élèves « inadaptés » faire une sorte de « rééducation » dans des établissements spécialisés ou dans le dispositif spécialisé. Une fois qu’ils été prêts, ils pouvaient intégrer l’école. Donc l’intégration elle est intéressante parce que y a plus d’élèves non scolarisés jusqu’ à présent qui sont arrivés dans les écoles, mais en même temps, ça ne nécessitait pas de demander pas à l’école de se transformer, puisque c’était une juxtaposition, des classes spécifiques et des classes dites ordinaires. L’école classique n’a donc pas évolué, ce sont les élèves différents qui ont dû s’adapter pour pouvoir y rentrer ».
Dans la même perspective, l’importance de la notation dans le système éducatif français s’inscrit dans une dynamique élitiste, discriminante. Parce que si le système de notation a pour avantage de valoriser ceux et celles qui réussissent, qui atteignent les objectifs donnés en suivant les consignes transmises, il réprime dans un même temps ceux et celles qui se trouvent en situation d’échec. Or, cette situation d’échec n’est pas seulement du au fait de réussir ou pas l’exercice donné, mais plutôt au fait de suivre ou pas les consignes et la démarche transmise.
Un autre élément central de l’instruction publique français est son modèle laïque, construit autour de la séparation des pouvoir Eglise-Etat. Le concept de l’Education Nationale, d’inspiration Jacobine prônant l’égalité de tous.tes au nom de l’intérêt général s’est alors emparé de l’instruction publique. Là est tout le paradoxe de cette évolution ; si elle a permis d’ouvrir l’école au plus grand nombre, elle a également engendré la création de la quasi-totalité des Grandes écoles, nées à cette période, excluant cette « masse » à laquelle l’instruction publique venait de s’ouvrir. La longévité de ses écoles, encore présentent aujourd’hui (malgré l’annonce du Président Macron de fermer l’ENA), démontre la complexité de ce système à deux vitesses, laïque, public, gratuit et pourtant, discriminatoire.
Les manquements (ex)inclusifs de l’école française
Ces problématiques historiques nous amènent à la notion d’inclusion, encore relativement absente du système éducatif français. Manque de formations adaptées, ABSENCE d’outils spécialisés, budgets insuffisants, l’école inclusive reste encore aujourd’hui un simple concept flou au sein de l’école française. Ainsi, si le nombre d’élèves en situation de handicap scolarié.e.s à largement évolué ces dernières années, la plupart restent en attente d’une aide adaptée ou d’une place en centre spécialisée. C’est notamment le constat que j’ai pu faire lors de mon entretien avec Christelle Laszczak, AESH. Ainsi, en m’exposant l’organisation des systèmes d’accompagnement des élèves aux besoins spécifiques au sein du système éducatif français, Madame Laszczak m’a démontré l’incohérence de ses dispositifs, existants mais insuffisants et très complexe.
Tout d’abord, pour être pris en charge par un.e AESH ou simplement suivi par la MDPH et ainsi s’intégrer au sein d’un PAP – Plan d’Accompagnement Personnalisé – ou d’un PPRE – Programme Pédagogique de Réussite Educative – , l’élève et sa famille doivent monter un dossier auprès de l’institution (MDPH) [Sauf dans le cas ou la demande est effectuée directement par l’établissement scolaire] :
« Alors déjà, si c’est la famille qui fait la demande, il y a un dossier à monter avec des documents à fournir : un bilan à fournir par les professeurs, un bilan en neuropsy valable 3 ans, un bilan du pédiatre ou neuropédiatre, un bilan orthophoniste, un bilan psychomot, un projet de vie. Poutr monter ce dossier, des accompagnements avec une assistante sociale existent mais il faut pour cela faire une nouvelle demande auprès de la MDPH. De plus, aucune de ces démarches n’est pris en charge par la sécurité sociale, donc il est possible de demander une aide financière à la MDPH mais cela demande un dossier supplémentaire. Vous pouvez comprendre que c’est une démarche très longue, beaucoup de documents à fournir et donc c’est très stressant pour les familles qui repousse souvent la démarche. Il faut également savoir que cette aide, si elle est attribuée, est seulement valable un certain nombre de temps c’est pourquoi il y a des Suivis de scolarisation, qui réévalue en permanence l’aide donnée. Dans les cas où il y a des non-reconductions, les parents doivent faire appel, pendant ce temps, l’élève se retrouve sans AESH, sans suivi … ».
Ensuite, les AESH, professionnel.le.s au cœur du système d’accompagnement des élèves aux besoins éducatifs spécifiques et notamment des élèves avec TSA, sont encore peu reconnu.e.s et valorisé.e.s au sein du système éducatif. Ce manque de valorisation est notamment visible par le faible nombre d’heures de formations qui leur sont attribuées. Ainsi, seules 60 heures de formation leur sont données, réparties pendant leur première année de fonction. Ces 60 heures sont aujourd’hui obligatoires. La question des salaires et du temps de travail fait également polémique comme nous l’explique Christelle Laszczak :
« Il y a donc du travail à faire pour spécialiser les AESH sur les maternelles, les primaires, les collèges et réfléchir à cette reconnaissance professionnelle, parce que finalement on ne nous prend pas en compte dans l’ensemble du système éducatif. Aujourd’hui, je ne connais pas d’AESH qui ont un contrat avec plus de 24h de travail. Nous sommes donc loin d’un temps plein. Je ne vais vous le cacher, 24h/ semaine = 700 Euros net. A ajouter à cela qu’avec la nouvelle disposition gérée par la PIAL, nous sommes sommes amené.e.s à travailler sur différents établissement et donc à faire de la route, à nos frais ! »
Ce qui nous amène au troisième point critique de ce système d’accompagnement français, personnalisé et planifié autour des AESH. Depuis 2018, ce sont les PIAL – Pôle Inclusif d’Accompagnement Localisé – qui sont chargés de recruter les AESH. Initialement, ce nouveau dispositif devait permettre une division géographique des prises en charges et donc d’éviter aux AESH d’être amenées à travailler loin de leur domicile. Or, aujourd’hui, sur le terrain, ce nouveau dispositif a surtout complexifié le quotidien des AESH comme nous l’explique Christelle Laszczak :
« Aujourd’hui, vous avez deux types d’AESH : les ASH I, Individuel.le.s, qui ont donc un seul enfant à charge et les ESH M, Mutualisé.e.s, qui s’occupent donc de plusieurs enfants avec orientation MDPH. On peut intervenir entre 8 et 12 heures, mais en mutualisé, on intègre donc les enfants que nous accompagnons dans ce même nombre d’heure. Cela ne veut pas dire donc que l’on offre à chaque enfant le nombre d’heures dont il aurait besoin, puisque nous avons un nombre limité d’heures. Pour certains il faudrait peut-être plus d’heure mais nous ne pourrions pas car le but est de prendre le plus d’élèves possible ».
Le témoignage de Christelle Laszczak nous permet de comprendre le système d’accompagnement des élèves aux besoins éducatifs spécifiques dans les classes ordinaires. Un système organisé donc autour de Plans d’accompagnements et de suivis personnalisés gérés par les MDPH, les PIAL et symbolisés sur le terrain par le travail des AESH. Mais qu’en est-il pour les enfants qui ne peuvent être scolarisé.e.s en milieu ordinaire ? Ceux aux handicaps lourds, aux maladies envahissantes ?
Les budgets éducatifs: entre volonté apparente et incohérences de fond
La question des financements est également au cœur des problématique du système d’accompagnement des enfants aux besoins éducatifs spécifiques en France aujourd’hui. Pour exemple, la formation spécifique à l’accompagnement des enfants avec TSA (Troubles du Spectre Autistique) de l’Educatrice spécialisée que j’ai interviewé, Julie Massonneau, n’a pas été payé par l’état mais par l’association Autisme Pau Béarn, avec laquelle elle travaille. Au cours de son interview, elle a également appuyé à de nombreuses reprises l’importance des association dans l’accompagnement des élèves TSA, qui, en plus de former les professionnel.le.s accompagnent les familles dans le système éducatif mais également dans la vie quotidienne. Dans d’autres pays d’Europe, dont l’Espagne, cet accompagnement à 360° est géré par l’Etat …
Ainsi, malgré des mesure fortes annoncées pour la rentrée 2020 et des budgets associés conséquent, le gouvernement français peine à offrir des réponses cohérentes aux familles et aux professionnel.le.s. Les 73 nouvelles classes, ou nouveaux dispositifs, annoncé restent encore trop juste par rapport à la demande et/ou incohérents par rapport aux besoins réels. De plus, comme le dénonçait la chercheuse en Sciences de l’éducation et professeure à l’INSPE de Nantes, Marie Toullec, en dehors des postes labélisés « Enseignant.e.s spécialisé.e.s », les autres enseignant.e.s ne sont pas du tout préparé.e.s à accueillir les élèves aux besoins éducatifs particuliers dans leur classe. Cette tendance, ne fait qu’accentuer le fossé entre les élèves dits « normaux » et les « autres ». Les « autres » qui continuent d’être « envoyé.e.s » en inclusion :
« Cette question de la forme scolaire elle est délicate ; par exemple on entend les enseignants dire Ah bah la Dimitri, il va en inclusion, pour dire ‘aller en classe dite de référence’, en classe ordinaire, sauf que en fait ça ne traduit pas l’inclusion, ça ne traduit que l’ancienne forme intégrative ! Il est en ULIS et de temps en temps il va en classe ordinaire, parce que bah il peut assumer la classe ordinaire, voilà. Pourtant aujourd’hui ce n’est pas ça l’objectif, c’est à dire qu’aujourd’hui la dimension inclusive demande aux élèves d’être scolarisés en classe ordinaire, point. D’être considéré comme les autres élèves, la classe ordinaire est leur lieu de vie et d’apprentissage ».
De plus, en dehors de ces démarches d’ouvrir plus de classes et de commencer à former des enseignant.e.s spécialisé.e.s, le gouvernement français n’a pas débloqué de budgets spécifiques pour généraliser des outils dédiés à cette inclusion. Une ironie lorsque l’on sait que les moyens consacrés au déploiement d’outils numériques pédagogiques sur le budget du ministère restent de l’ordre de 10 M€ par an.
Nous pouvons en effet parler d’ironie, puisque, sur le terrain, malgré les différentes études que j’ai pu réaliser (questionnaire, entretiens, interviews…), seuls des vade-mecum semblent être connus des professionnel.le.s de l’éducation. Une impression qui m’a été confirmée par la chercheuse Marie Toullec lors de notre entretien : « D’habitude dans l’armature institutionnelle, il y a des décrets et des circulaires. Depuis l’arrivée de J.M Blanquer il y a un 4e élément que l’on pourrait nommer Vade-mecum, c’est à dire des aides aux enseignants. Maintenant, cela se vaut outillon, mais qu’est-ce que c’est véritablement un outil ? Ils sont à titre informatif mais si c’est appelé un outil, pas sûr que ce soit un instrument du côté des pratiques. La différence c’est qu’un outil tient plutôt de l’ordre de quelque chose que l’on va pouvoir faire, mais un instrument c’est quelque chose qui va transformer les pratiques. Aujourd’hui en France, on va trouver beaucoup de ces écrits qui ne sont ni théoriques ni pratiques ».
Pour résumer, en analysant les politiques éducatives françaises et les réalités terrain, nous pouvons relever trois grands manquements : des formations – pour les professionnel.le.s de l’éducation (et les professionnel.le.s médico-sociaux accompagnant.e.s), des pédagogies adaptées et des budgets affiliés (et cohérent). La France peine ainsi à inclure les élèves aux besoins éducatifs spécifiques – favorisant un modèle dépassé de scolarisation à deux vitesses, entre intégration et discrimination.
Afin continuer votre exploration sur la situation de l'école inclusive en France, je vous propose le visionnage d'un débat organisé par Canopé ainsi qu'un épisode de l'émission Vox pop, produite par ARTE :
- « Alexandre Ployé : la dimension historique de l'inclusion scolaire », réalisé par le Réseau Canopé – 18 février 2021
- « Enfants handicapés : l'école sait-elle les accueillir ? », Vox pop réalisé par ARTE - 30 août 2021
Je vous invite à écouter ou réécouter les 6 épisodes de mon podcast Voix d'école, donnant la parole à ceux et celles qui font l'école aujourd'hui:
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Le situation de l’école inclusive en France est une vaste question, c’est pourquoi j’ai tenté dans cette article de démultiplier les Regards, à travers mes entretiens et échanges réalisés dans le cadre de mon Mémoire de recherche. Il m’a également tenu à coeur de m’appuyer sur divers ouvrages et documentaires, plus ou moins récents. Si vous êtes intéressé.e.s par ma bibliographie et ma filmographie complète n’hésitez pas à venir vers moi, en commentaire, en MP ou par mail.
La semaine prochaine, je vais vous proposer une autre perspective de l’école inclusive, celle de du système éducatif Espagnol. Pour anticiper ce nouveau Regard, je vous invite à visionner l’émission Vox pop dont le lien est juste en dessous, en fin d’article.
Si vous êtes un.e professionnel.le.s de l’éducation et que vous portez un projet d’école inclusive ou que vous souhaitez en être, n’hésitez pas à nous partager vos projets, idées et envies en commentaire ou sur les réseaux sociaux du blog: LinkedIn, Instagram, Facebook. Votre Regard est ici au coeur de tout !
Histoire éducative française : Ecole Intégrative VS Ecole inclusive
Vous allez rapidement le comprendre en découvrant un rapide tour d’horizon de l’Histoire éducative française, le pays des lumière est loin d’être un exemple en matière d’école inclusive. De par son histoire, prônant une éducation élitiste, différenciée entre les classes sociales pendant longtemps, mais également à cause de ses politiques, favorisant les résultats académiques, bien avant le climat scolaire. Alors à une époque ou l’école inclusive est défendue par les institutions internationales, la France peine à faire entrer en cohérence, textes de lois adaptés et pratiques de terrain.
Dans ce second épisode, je vous propose un rapide tour d’horizon de l’histoire éducative française; dans le sens large dans un premier temps, puis à travers le spectre de l’inclusion, ou du moins de l’intégration. La semaine prochaine, nous rentrerons cette fois dans les détails de ce système éducatif et social, complexe et souvent bancal …
Histoire éducative française: La scolarisation des élites
L’université impériale
La création, par la loi du 10 mai 1806, de l’Université impériale, « corps chargé exclusivement de l’enseignement et de l’éducation publique dans tout l’empire », et son organisation par le décret du 17 mars 1808, ouvrent une page nouvelle dans l’histoire politique et éducative de la France, et donnent au projet révolutionnaire d’un État enseignant une spectaculaire incarnation institutionnelle. Une nouvelle page, par ailleurs, qui se joue en dehors des frontières française, puisque l’extension de l’Université impériale de l’époque, due à la conquête napoléonienne – vers les Pays-Bas, la Suisse, l’Italie et l’Espagne – a fait décliner le décret dans une majorité des pays d’Europe.
Ainsi c’est le décret affilié du 17 mars 1808 qui a posé les fondations durables de l’institution scolaire publique française et consacré le principe du monopole de l’Etat sur l’enseignement. Cette démarche s’est accompagnée de la création d’une corporation laïque, désignée comme le « corps enseignant », à laquelle on donna le nom de la plus ancienne et la plus universelle des institutions scolaires européennes : l’université.
L’entrée en jeu des Etats d’Europe, sous l’Empire Napoléonien, comme acteurs de l’histoire éducative est ancienne, mais leur place reste néanmoins longtemps limitée. En effet, c’est avant tout les déchirements religieux du XVIe siècle qui ont joué un rôle incontestable dans le soutien et l’encadrement des études et de leur population : les petites écoles devenant un instrument majeur d’évangélisation et les collèges, écoles latines et académies, un enjeu dans la lutte pour le contrôle des esprits des élites.
L’Eglise catholique
En France, l’Eglise catholique et l’Etat apparaissent à l’époque contemporaine comme des forces concurrentes ou antagonistes, selon les périodes, dans la construction du système d’enseignement. En France, de nombreux affrontements idéologiques, dans la période 1880-1905, ont catégorisés de fortes tensions, trouvant leur épilogue dans la loi de séparation de 1905.
Dans l’avant-guerre, la notion de patrie est au cœur des débats, modifiant la vision des temps enseignés, particulièrement du futur dans lequel on souhaite inscrire les enfants. Ainsi, avant 1914, à l’école publique, le futur de la nation, c’est l’humanité ; l’humanisme est censé être l’aboutissement du patriotisme, de la même façon que la république couronne l’histoire de la construction de l’État dans les manuels de Lavisse, grands ou petits. Or, cette concordance entre le France et l’humanité vole ne éclat avec la Grande Guerre : car le patriotisme a abouti à la guerre, « boucherie » négatrice de l’humanisme.
Un nouvel équilibre se fixe finalement dans les années 1920, grâce à un effort de relecture venant du bas : des instituteurs et institutrices, qui, dans leurs réunions et congrès syndicaux, demandent – et obtiennent – des éditeurs qu’ils purgent les manuels scolaires des passages jugés « chauvais », s’inscrivant dans la lignée patriotiques, encouragée par l’Eglise Catholique, d’avant-guerre. Une relecture rendu effective dans les nouveaux programmes de 1923.
L’école Républicaine
Les successives affaires d’Éthiopie, d’Espagne, de Tchécoslovaquie, font des années 1930 les années d’un nouveau désenchantement. Après la désacralisation de la patrie, l’école ressent douloureusement l’impuissance de la SDN, qui affaiblit, voire ruine ses espoirs dans la paix et déplace parfois les fins de l’histoire enseignée. Il n’empêche qu’à la veille de la seconde mondiale, l’école apparaît porteuse d’un enseignement national dont le corps sacré, nation patriotique ou nation pacifique, pose un problème.
Après s’être subitement arrêtée pendant la Seconde Guerre Mondiale, happée par le régime Nazi, l’école républicaine se trouve un nouvel horizon dans les années 1930 : la paix. La nation pacifique incarne dorénavant le corps sacré de la nation — en concurrence ou en ambivalence avec la nation patriotique qui continue à être portée par l’école catholique et des pans entiers de la société — sans s’imposer toutefois pleinement, en raison du contretemps qui la déstabilise, ce qui constitue un des éléments les plus structurels de la crise d’identité nationale si profonde des années 1930 et 1940.
Comme partout dans le monde, la France se voit aujourd’hui soumise à de nouvelles régulations internationales, dues à une volonté d’unification des systèmes d’enseignement depuis deux siècles. Cette pression s’inscrit principalement dans une dynamique de concurrence internationale, alimentée autant par la comparaison des performances des systèmes éducatifs que par la volonté d’harmonisation interétatique.
Histoire éducative française: Volonté d’inclusion et réalité intégrative
A l’échelle française, « le droit à l’éducation pour tous les enfants » est reconnu comme un droit fondamental. La loi sur la Refondation de l’école datant de juillet 2013, consacre pour la première fois le principe d’inclusion scolaire sous la joute de Najat Vallaud-Belkacem, alors Ministre de l’Education Nationale [gouvernement du Président de la République François Hollande].
Complexité des systèmes
Un choix de politique éducative récent donc qui instaure la notion d’inclusion et pose les bases d’une nouvelle Ecole (dans sa globalité : primaire, collège, lycée, université). Néanmoins, la difficulté principale de la situation scolaire française est due à la complexité des structures et dispositifs existants. Dépendants de trois ministères différents (éducation nationale, santé et affaires sociales, justice), ces structures regroupent un champ très large de publics à besoins particuliers :
-primo-arrivants
-enfants du voyage
-élèves à difficulté sociale
-enfants intellectuellement précoces -enfants malades et en situation de handicap physique et/ou moral
-élèves ayant des difficultés d’apprentissage…
Il s’agit ensuite pour ces structures de faire la part des choses entres les enfants nécessitant d’être scolarisés dans un établissement spécialisé ou un enfant pouvant être scolarisé dans un établissement ordinaire. En fonction du diagnostic posé, les possibilités d’accompagnement au sein d’un établissement classique sont également multiples [classe ULIS, présence d’un.e AESH, tiers-temps…].
Pour prendre l’exemple des enfants reconnus comme porteurs d’un handicap physique et/ ou mental, 25%15 d’entre eux sont pris en charge en établissements spécialisés médico-sociaux, hospitaliers ou judiciaires ; 25% sont scolarisés en dispositif spécialisés collectifs [ULIS, SEGPA…] et 50% sont scolarisés en classe ordinaire de l’Education Nationale à titre individuel, avec ou sans AESH. Le système français continu malgré ces structures d’être l’un des plus critiqués d’Europe. En cause, la formation des enseignant.e.s, inadaptée, d’après le sociologue de l’éducation François Dubet ; « La pédagogie frontale proposant les mêmes contenus à tous les élèves doit se transformer en une pédagogie différenciée, soucieuse de prendre en compte ‘toutes les différences’ ». Ainsi, il dénonce une inclusion scolaire de façade qui se traduit en réalité, lors de la scolarisation des enfants à besoins particuliers en école ordinaire, par une « scolarisation très partielle avec quelques heures dans la semaine, un personnel insuffisamment formé, des aménagements aléatoires ».
Inclusion dans les textes, intégration dans les écoles
Réclamant une implication plus importante des enseignant.e.s par des formations adaptées et le développement d’une pédagogie adaptée, les sociologues de l’éducation comme le Docteur Dubet se positionnent aujourd’hui au côté des associations de parents d’élèves, réclament des mesure depuis longtemps.`
Alors pourquoi ce décalage ? Il s’expliquerait pour Charles Gardou par un passage trop rapide entre une pratique d’intégration scolaire à une politique d’inclusion scolaire : « L’objectif de l’intégration est de faire entrer dans un ensemble, d’incorporer. (…) Un élément extérieur, mis dedans, est appelé à s’ajuster à un système préexistant. Ce qui est premier est l’adaptation de la personne : si elle espère s’intégrer, elle doit d’une manière assez proche de l’assimilation, se transformer, se normaliser, s’adapter ou se réadapter. Par contraste, une organisation sociale est inclusive lorsqu’elle module son fonctionnement, se flexibilise pour offrir au sein de son ensemble commun, un « chez soi pour tous ».
Ainsi, l’unification du système éducatif français, à partir des réformes de structure de la période gaulliste, a posé la question de la place des identités dans l’enseignement au regard de l’objectif de l’égalité des chances. Dans le contexte social de la massification des études secondaires des années 1960, Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron ne plaident certes pas pour un projet d’éducation compensatoire, mais leur critique ouvre la voie à la prise en compte des inégalités territoriales dans leurs dimensions sociales. La question est désormais de savoir comment la République peut accompagner le passage à une société pluriethnique et pluriculturelle.
La tradition française est ainsi issue d’un processus révolutionnaire de libération, reposant à l’origine sur la même visée fondamentale propre au développement de tout Etat-nation démocratique : advenir citoyen, être humain reconnu en tant qu’individu libre et égal en droit, responsable et autonome, procède d’un processus d’émancipation. L’école française a ainsi était construite autour d’une succession de programmes d’études et non sur un curriculum des savoirs disciplinaires. Quant à la fonction de socialisation, elle vise essentiellement le développement d’une conscience citoyenne par l’imposition d’un modèle unitaire qui implique la soumission du singulier (les caractéristiques personnelles) et du particulier (l’âge, le sexe, l’origine sociale, ethnique, etc.) à un sujet social, abstrait et universel, conforme au modèle citoyen républicain laïc
Législativement, c’est finalement la Constitution du 4 octobre 1958 qui va donner une première clé pour un enseignement commun et égalitaire :
« L’organisation de l’enseignement public obligatoire gratuit et laïc à tous les degrés est un devoir d’Etat »
Liberté, égalité, laïcité
La laïcité devient alors une signature française, notamment au niveau de son système éducatif. Le principe de laïcité implique ainsi le respect des croyances des élèves et de leurs parents ainsi que la liberté religieuse. La traduction de ce principe se résume par l’absence d’instruction religieuse dans les programmes, l’absence de tout prosélytisme religieux, tant du côté des élèves que des personnels, dans l’enceinte des écoles et établissement scolaires.
Ensuite, c’est la liberté d’enseignement qui est au cœur des valeurs éducatives française. Présente également dans les trois piliers de la République Française [Liberté, égalité, fraternité], la liberté s’entend ici comme :
Liberté d’organiser et de dispenser un enseignement
Liberté pédagogique pour les enseignant.e.s
Liberté de choix des parents [Entre les enseignements publics, privés, mais également au niveau des orientations ou encore des choix d’établissement – sectorisation]
L’égal accès des enfants à l’instruction fait une fois de plus référence à une des valeurs Républicaines de la France, l’Egalité. Le principe d’égalité de traitement implique ainsi que des critères identiques soient appliqués par le service public de l’enseignement pour répondre aux demandes des usagers, mais également un principe de non-discrimination à l’encontre des élèves handicapés et étrangers.
Dans la même ligné que le principe de Laïcité, l’enseignement public français est neutre : neutralité philosophique, politique religieuse et syndicale. Celle-ci est imposée aux enseignant.e.s, à tous les acteur.trice.s éducatifs et administratifs, ainsi qu’aux élèves. En complément, la liberté d’expression collective et d’information est reconnue aux élèves [Article L.511-2 du code de l’Education].
Les derniers évènements au sein de l’Education Nationales (Suicide de Christine Renon, directrice d’école à Pantin en octobre 2019 et assassinat de Samuel Paty à Conflans-Sainte-Honorine en octobre 2020), ont remis en question de principe de liberté d’expression tout en mettant en lumière la pression vécue en continue par les enseignant.e.s et personnel.le.s éducatifs au sens large :
Quelle limite à la liberté d’expression ?
Pourquoi les valeurs républicaines sont-elles sujet à débat au sein des écoles françaises aujourd’hui ?
Quelle reconnaissance pour les enseignant.e.s aujourd’hui ?
…
Tant de problématiques nouvelles ou remise au cœur de l’actualité qui questionnent et bouleverse l’école française, ses valeurs et pédagogies, confrontées en parallèle à une comparaison européenne de plus en plus importante. Nous touchons là à la principale difficulté vécue par le système éducatif français: une école pour tous.tes, pourtant loin d’être adaptée à tous.tes. Accessible, intégrative mais loin, très loin d’être inclusive.
Pour poursuivre vos recherches sur l'histoire éducative française et ses rapports aux systèmes inclusifs, je vous conseille ces trois ouvrages universitaires très complets:
- Philippe Savoie, « L’État et l’éducation en Europe occidentale. Comparaison et jeux de miroirs », Histoire de l’éducation, 134 | 2012, 5-17.
Politiques d'éducation et identités territoriales. Carrefours de l'éducation, 2(2), 7-14. (2014) https://doi.org/10.3917/cdle.038.0007
- Poizat, D. (2006). Repères sur l'inclusion : monde, Europe, France. Reliance, 4(4), 99-103. https://doi.org/10.3917/reli.022.0099
- Zendrera, N. Freixa Niella, M. & Grangereau, I. (2015). Politiques éducatives inclusives dans le supérieur en Espagne et en France Approche comparative. La nouvelle revue de l'adaptation et de la scolarisation, 1(1), 73-89. https://doi.org/10.3917/nras.069.0073
Ce fut un exercice difficile pour moi de vous présenter l’Histoire éducative française, sans vous pondre un article universitaire et illisible. J’espère avoir réussi mon pari en partant des éléments centraux et en revenant au maximum à cette différence béante entre inclusion et intégration.
La semaine prochaine, je vais élaborer cette fois autour de notre système éducatif et social en lui-même, prônant l’inclusion mais pourtant encore bien loin d’en être à la hauteur …
Si vous êtes un.e professionnel.le.s de l’éducation et que vous portez un projet d’école inclusive ou que vous souhaitez en être, n’hésitez pas à nous partager vos projets, idées et envies en commentaire ou sur les réseaux sociaux du blog: LinkedIn, Instagram, Facebook. Votre Regard est ici au coeur de tout !
Retour des portraits Le Grand Saut aujourd’hui ! Avec cette série, je souhaite vous proposer à découvrir des parcours inspirants de jeunes étudiant.e.s-entrepreneur.se.s ayant osé l’entreprenariat, malgré les doutes, les risques. Chahrazad est de ceux-là. Femme engagée dans la vie de son quartier, élève passionnée au parcours personnel aussi unique qu’atypique, Chahrazad a osé effectuer non pas un mais deux Grands sauts, en créant une première association à 20 ans et en montant un second projet, entrepreneurial cette fois, 6 ans après. Deux projets qui répondent à des problématiques sociales, actuelles et nous concernant tous.tes, bonne découverte …
Chahrazad
Comme vous avez pu le constater, le rythme des articles s’effectue finalement en alternant entre mes deux séries : Serial entrepreneuse et Le grand saut. Mis en place pour des raisons techniques et d’organisation, ce rythme me permet surtout aujourd’hui de vous offrir un article par semaine, sans me mettre la pression pour trouver quelqu’un à interviewer chaque semaine. J’espère que ce tempo vous va, comme toujours votre Regard compte pour moi !
Qui es-tu ?
Chahrazad Merini, a 26 ans, femme engagée, elle a toujours porté un fort intérêt à l’épanouissement des jeunes en banlieue, environnement dans lequel elle a grandi. Il y a 6ans, souhaitant réaliser son rêve d’ancienne enfant malade, elle créé avec sa maman ANIM’HOPY, association qui intervient auprès des enfants hospitalisés. Le monde associatif, Chahrazad le connait bien, puisque, en tant que militante à Villenave Saint George et en dehors, elle a toujours été impliquée pour porter et accompagner les rêves de ceux et celles qui, comme elles, ont longtemps cru que réussir c’était pour les autres.
Quel est ton parcours ?
Le parcours de Chahrazad s’inscrit dans une démarche en cohérence avec ses engagements
En débutant avec un Bac STSS, elle a d’abord voulu devenir infirmière, un métier pour prendre soin des autres. Mais c’est finalement en observant les éducateur.trice.s qui l’ont accompagnée tout en long de son enfance et de son adolescence, qu’elle décide de s’orienter vers un DUT Carrière sociale en 2 ans, option animation socioculturelle et coordination de projet. A côté de ses études, Chahrazad est stagiaire, puis bénévole, au sein de l’Association S.O.W Smiles for the Orphans in the World, pour accompagner des jeunes, de tous les âges dans un premier temps, puis pour préparer leur brevet, avec pour objectif la réussite de leur diplôme et l’amélioration de leur confiance en eux.elles.
A la fin de ces 2 ans universitaires, Chahrazad lance son association ANIM’HOPY en impliquant les jeunes et les habitants de son quartier. La plupart travaille d’ailleurs encore avec elle aujourd’hui ; sa maman, son petit frère mais également un groupe d’adolescent.e.s et d’animateur.trice.s de son quartier.
A la suite de son DUT Chahrazad décide de poursuivre avec une Licence en ESS [Economie Sociale et Solidaire]. Pour valider celle-ci, elle réalise un stage au sein de l’asso Yes we can Production, qui forme les jeunes à l’Empowerment. Elle a ainsi été chargée de monter la première formation regroupant des avocats, des politiques et des jeunes pour les former au droit et aux recours dans la réalisation de leurs projets. C’est cette expérience qui lui a démontré qu’il existait des associations qui contribuaient, sur le terrain, à des causes telles que l’amélioration de la confiance en soi chez les jeunes ou encore la valorisation de projets des jeunes de quartiers. C’est à la suite de cette expérience qu’elle fonde, Winners Programme’s, aujourd’hui IWIN’Z, qui propose des Ateliers et des programmes d’accompagnement et de motivation inspirés d’outils d’excellence comme la neuro-éducation, le développement personnel, les pédagogies positives. Aujourd’hui, en auto-entreprise, Chahrazad souhaite par la suite développer son projet sous le statut de SCOP ou d’association, pour une approche ESS [Economie Sociale et Solidaire] en adéquation avec ses valeurs.
Finalement, Chahrazad a terminé son parcours universitaire en 2019 avec un Master en Sciences de l’éducation, parcours Animation et Education populaire à l’UPEC. En parallèle de celui-ci elle substitue son stage obligatoire pour mettre en place ses programmes : accompagnement de deux groupes de jeunes passant leur brevet et leur bac. Une expérience qui lui a permis de mettre en pratique ses connaissances et ses savoirs tout en testant son projet.
En effet, le Statut d’état Etudiant Entrepreneur, vous permet de remplacer votre stage obligatoire de L3 ou de M2 en temps dédié à votre projet entrepreneurial. Une opportunité unique qui vous donne le temps pour développer votre projet tout en validant votre semestre. Vous pouvez trouver plus d’informations sur le Statut sur Le statut national étudiant-entrepreneur | Gouvernement.f
Ton Regard sur l’entreprenariat
Ayant un papa entrepreneur, Chahrazad s’est occupée très jeune de l’aspect administratif et communicationnel d’une entreprise. Sa vision principale de ce secteur concernait l’importance de la détermination tout en ayant conscience que c’était possible, pour tous.tes. Pour elle, avec beaucoup d‘énergie et de motivation, l’entreprenariat pouvait permettre de réaliser des rêves, comme elle l’a fait avec son association. Etant de nature persévérante, elle a rapidement pris conscience que ce statut était exactement ce qu’il lui fallait.
Ton Grand Saut
Autonome depuis longtemps grâce à son projet associatif, c’est en tombant sur une annonce du Pépite que Chahrazad fait le choix du statut EE. En effet, celui-ci allait lui permettre de réaliser son projet tout en étant protégée par le statut étudiant, lui donnant notamment le droit aux bourses et à des tarifications intéressantes. Rentrée au sein du Pépite en dernière année de Master, Chahrazad a par la suite renouvelé deux fois son statut afin d’en garder les avantages.
Evolution de ton projet
Au moment de se lancer, Chahrazad est en phase de test : programme, besoins, public … Elle analyse sur le terrain en réalisant des premiers ateliers test. En septembre de cette même année, elle demande son statut d’auto-entrepreneuse afin de pouvoir s’organiser financièrement. Ayant un public spécifique n’ayant pas de moyens financiers très importants afin de suivre ses ateliers, elle propose des ateliers gratuits pour les jeunes directement. C’est ensuite en travaillant auprès d’autres associations et municipalités qu’elle fait facturer ses services afin de rentrer dans son plan financier. A chaque fois, Chahrazad essaye donc d’adapter ses devis en fonction des budgets de ses clients, qu’ils soient particuliers, associatifs ou institutionnels. C’est en diversifiant ses ressources que Chahrazad a réussi à créer son Plan financier : le programme Emergence de France Active qu’elle a suivi en seconde année de Statut EE l’a beaucoup aidée à s’organiser de ce côté-là.
Chahrazad s’est lancée toute seule car elle avait sa propre vision de son projet. A ses côtés, elle a beaucoup été encouragée par plusieurs professionnel.le.s croisé.e.s pendant son parcours : Sa tutrice de Yes we can Production notamment, ou encore une éducatrice l’ayant suivi plus jeune.
Aujourd’hui créée, l’entreprise de Chahrazad travaille avec deux municipalités ainsi que des associations (Maisons de quartier) et particuliers. Toute seule pour cette première année, Chahrazad propose de l’accompagnement scolaire et des Master Class pour transmettre aux jeunes des outils et de la méthodologie pour leur redonner confiance en eux.lles et en leurs capacités à apprendre.
Dans les quartiers, il y a de nombreuses barrières mentales qui font croire aux jeunes qu’ils ne peuvent pas réussir. Venant en complémentarité des associations, Chahrazad est en collaboration directe avec les organismes institutionnels, pour apprendre aux jeunes à réagir face à la difficulté – aspect psychologique. Son intitulé de poste : Facilitatrice de parcours.
La COVID a été la première grande difficulté dans le projet de Chahrazad. La crise sanitaire a ainsi tout bloqué dans son projet au moment exactoù son entreprise prenait forme (obtention de son statut juridique). Les contrats qui venaient d’être signés ont ainsi été repoussés. Encore aujourd’hui, remobiliser les partenaires est quelque chose de très difficile, l’envie est toujours là mais les organismes derrière ont du mal à suivre, notamment à cause de l’instabilité de la situation globale.
Ton accompagnement
En bénéficiant de certains droits étudiants, en termes de bourse, de carte Navigo, le Statut EE fait, pour Chahrazad, déjà la différence. De plus, ayant des problèmes de santé, le statut a permis à Chahrazad d’être à 100% dans son projet sans avoir à travailler à côté. Le Pépite lui a également permis de créer des liens avec d’autres entrepreneur.se.s, malgré les projets différents, et à la démarche de chacun.e, plutôt individuelle. En temps de COVID c’est un lien qui fait grandement la différence. La situation actuelle a beaucoup bloqué les échanges entre les étudiants-entrepreneurs et c’est vraiment le côté réseau qui manque aujourd’hui.
A côté de son Statut EE, Chahrazad a suivi le programme Emergence de France Active, sur 6 mois. Rejoint grâce à son tuteur, c’est un programme qui lui a permis de réaliser un Business Plan adapté au secteur de l’associatif. Notamment au niveau de l’accompagnement des jeunes, elle savait que son tarif serait amené à évoluer et elle ressentait le besoin d’un accompagnement spécifique en ESS pour placer son Business Plan en cohérence avec ses valeurs. Grâce à des professionnels de l’ESS et des ateliers liés, Chahrazad a pu échanger également avec d’autres porteurs de projets engagé.e.s, lui donnant le moyen de faire des passerelles entre les projets. Il faut savoir que le Programme Emergence permet également, d’avoir des aides financières pour les projets spécifiques à l’ESS.
A chaque fois qu’elle propose son projet, Chahrazad sent que ça touche les gens et que ça leur parle, elle n’a donc jamais ressenti un quelconque manque de légitimité. Néanmoins, elle note tout de même, que n’ayant pas eu besoin de récolter des fonds, elle n’a pas eu besoin de prospecter auprès d’éventuels partenaires financiers, souvent plus friands des jeunes entrepreneur.se.s sans expérience.
Ta perspective d’évolution
Continuer à intervenir auprès de nouvelles associations et municipalités est le premier objectif de Chahrazad dans les mois à venir. Elle aimerait également former d’autres personnes pour intervenir dans d’autres départements que le Val-de-Marne, par une approche Neurodéveloppementale et des outils de confiance en soi. Se connaitre est une clé dans la réussite des jeunes. Pour Chahrazad, c’est évident et c’est pourquoi passer par la Neuro-éducation est central pour enseigner aux jeunes le fonctionnement de leur cerveau et leur faire comprendre que rien ne leur empêche de réussir à part leurs doutes, aprioris et peurs. Plus que jamais, Chahrazad veut enseigner cette idée qu’elle applique sur elle-même : Y croire et persévérer sont les clés, quoi qu’il arrive.
Et toi, qu’attend-tu pour te lancer?
Ose, crois en toi et brille ! Tant que l’on n’est pas lancé on ne peut pas savoir. Pendant une année, j’ai fait des budgets prévisionnels mais en réalité la tarification est subjective, une personne qui croit en ton projet peut te donner beaucoup, là ou une personne qui ne croit pas en ton projet, remettra en cause ton tarif. En croyant toi-même en ton projet, tu convaincras mais pour cela, il faut aller sur le terrain et trouver la validation auprès des différent.e.s acteur.trice.s de ton terrain d’action.
Nous voilà à la fin d’un nouveau portrait. J’ai beaucoup aimé échanger avec Chahrazad sur son parcours inspirant et ses valeurs d’inclusion, de partage et de persévérance que nous avons en commun. Je te remercie Chahrazad, une nouvelle fois chaleureusement ! J’espère que ma retranscription est à la hauteur de notre échange.
Comme toujours, n’oubliez pas d’aimer, commenter et partager cet article et les posts associés sur LinkedIn et Instagram.
A très vite pour un nouvel article, portrait ou revue, d’un monde entrepreneurial en plein bouleversement !
Passer d’une d’une idée, abstraite, incertaine, floue, à un projet, c’est avant tout statuer que cette idée là, on veut en faire quelque chose, quelque chose de concret. Or pour moi, il s’agit là de l’étape la plus importante d’un projet entrepreneurial. Une fois ce pas essentiel franchi, reste tout le reste: Par ou on commencer ? Avec quels moyens (humains et financiers) ? Quel cadre l’égal en étant encore étudiant.e ? Comment s’organiser ? Ou trouver de l’aide ? Aujourd’hui, on se penche donc sur l’ébauche d’un projet entrepreneurial.
Entant qu’étudiant.e ou jeune diplômé.e on se sent souvent perdu entre les obligations que ces statuts comportent (réussir ces études, trouver un stage, gagner en indépendance, trouver un premier emploi à la hauteur de notre diplôme…) et nos envies. Alors quand finalement on franchit le pas de se lancer dans l’entreprenariat c’est une floppé d’émotions et de contradictions qui nous envahissent. Pourtant des organismes – publics et privés – des sites et des statuts pour nous aider, il en existe, encore faut-il les trouver…
Pépite France – Le réseau des étudiant(e)s-entrepreneur(se)s
Et oui quand je vous dit qu’il existe des choses; des organismes, des sites, des statuts pour nous accompagner dans notre création d’entreprise entant qu’étudiant.e ou jeune diplômé.e, c’est au point ou en France il existe un réseau dédié. Qui plus est, un réseau d’état, public donc et affilié avec les universités et écoles post-bac. Autrement dit, le réseau Pépite France, ce sont, depuis 2014, 33 Pôles Étudiants Pour l’Innovation, le Transfert et l’Entrepreneuriat (PÉPITE), partout en France. Divisés autour de deux systèmes intrinsèquement liés:
Le Statut National Etudiant(e)-Entrepreneur(se)s pour les étudiant.e.s et jeunes diplômé.e.s [une première mondiale]; vous permettant de construire et de développer votre projet en bénéficiant d’un accompagnement quelle que soit la démarche entrepreneuriale (individuelle, collective, à finalité économique et/ou sociale, innovante ou non, technologique ou non, avec création d’activités ou reprise d’entreprise ou autre structure juridique).
Le Diplôme National Etudiant(e)-Entrepreneur(se)s pour étudiant(e) et jeunes diplômé(e)s ayant obtenu le Statut National Etudiant(e)-Entrepreneur(neuse)s; permettant de valider votre projet entrepreneurial à la place d’un stage, de conserver vos droits de bourses même en ayant terminé vos études et également d’obtenir un diplôme reconnaissant vos acquis à la suite de votre projet entrepreneurial.
Dans les deux cas, Pépite France, vous propose un double accompagnement grâce à un système de tutorat: interne à votre université référente, avec un représentant du cadre professorale et externe avec un.e professionnel.le (entrepreneur.se ou pas), tout deux vous accompagnant tout au long de votre projet. A cela s’ajoute un large réseau de soutien sur toute la France, des aides au financement affiliées et même des espaces de coworking spécialement dédiés, en fonction des Pépites.
N'hésitez pas à vous rendre sur le site officiel Pépite France, pour plus d'informations, des contacts dans votre région et les démarches à suivre pour demander le statut: https://www.pepite-france.fr/
Les CCI – Chambres des Commerces et de l’Industrie
D’autres auraient certainement commencé par là, mais dans notre cas précis, d’étudiant.e.s et jeunes diplômé.e.s, mieux vaut encore être accompagné.e avant de se plonger dans le monde complexe des CCI. Parce que l’Etablissement Nationale CCI France, ce n’est pas moins de 126 établissements publics nationaux, régionaux et locaux, divisés sur le territoire français.
Concrètement, il s’agit là du réseau français dédié aux entreprise, de leur création (démarche, statuts, reconnaissance…), à leur fermeture, en passant par leur gestion (aide au financement, accompagnement à l’embauche…). CCI France concerne toutes les formes d’entreprise et d’entreprenariat (indépendant, société, freelance…) et la majorité des domaines d’intervention (Commerce, Industrie, Service, Environnement, Formation, Emploi, Innovation, Communication…).
Les porteur(se)s de projet y sont accueilli.e.s en fonction de leur spécificité (employé.e, chômeur.se, étudiant.e…), formé.e.s, accompagné.e.s… L’encrage régional des CCI leur permet une très bonne connaissance des bassins d’emploi, des besoins spécifiques régionaux et de grands réseaux professionnels en fonction de votre territoire d’implantation. Je note néanmoins, que comme tout organisme public ouvert au plus grand nombre, les places sont chers et l’accompagnement plutôt global, contrairement à un organisme spécifiquement dédié aux étudiant.e.s entrepreneur.se.s et jeunes diplômé.e.s comme vu avec Pépite France.
De même, n'hésitez pas à vous rendre directement sur le site officiel de l'Etablissement National CCI France et sur les sites de vos CCI régionaux: https://www.cci.fr/web/portail-acfci/accueil
Les organismes privés spécialisés
BGE ADIL
Depuis 1980, BGE ADIL est un organisme privé accompagnant dans leur projet les créateurs et développeurs d’activités. Sur leur site vous pouvez en quelques clics vous créer un compte et avancer pas à pas dans votre création d’entreprise, grâce à des articles très complets, des modèles de financements et même un Business Plan interactif.
Pour aller plus loin, BGE ADIL vous propose un premier rendez vous gratuit pour faire le point sur votre projet et vous proposer ensuite un suivi cohérent en fonction de celui-ci.
Pour les étudiant.e.s entrepreneur.se.s, BGE ADIL est affilié depuis cette année au programme Entrepreneurs Leaders de la Région Ile de France. Un opportunité incroyable qui propose aux moins de 26 ans, aux bénéficiaires des minimas sociaux (RSA, ASS…) et habitants des quartiers politiques de la ville, trois formats d’accompagnements super complets, GRATUITS:
1- Bâtir mon projet: jusqu’à 12h de conseil dédiées à la création d’entreprise, du Business Plan au modèle de choix de statut juridique, en passant par la recherche de partenaire.
2- Financer mon projet: jusqu’à 50 000 Euros pour structurer financièrement son projet et un accompagnement à la mobilisation de fonds adaptés avec des partenaires de BGE ADIL.
3- Piloter mon entreprise: un accompagnement tout au long des 3 premières années de vie de votre entreprise, pour vous aider à développer votre réseau, construire un pilotage effectif, effectuer des recrutements pertinents…
Grâce à la Pépite 3F au sein de laquelle j’ai pu obtenir mon statut d’étudiante – entrepreneuse, tout en restant étudiante en Master Sciences de l’éducation au sein de l’UPEC (Université Paris Est Créteil), j’ai pu saisir l’opportunité du programme Entrepreneur Leader. Une expérience que je me ferai un plaisir de vous partager au cours des prochains mois sur mon Instagram, Regard le blog, Story Entreprenariat !
BPI FRANCE
Banque publique d’investissement à ses débuts, BPI FRANCE c’est au fur et à mesure spécialisé dans l’accompagnement des projets entrepreneuriaux, grâce notamment à trois accélérateurs PME et Startups lancés en 2015. Depuis 2019, BPI FRANCE c’est également BPI FRANCE Création avec un service spécialement dédié à ceux (et celles j’espère…) qui entreprennent sur tout le territoire français.
Grâce à un Pass en ligne il vous est possible de numériser votre création d’entreprise en la documentant, grâce à divers articles et Foires aux questions très complètes, tout en rédigeant au fur et à mesure votre projet via votre Pass en ligne.
La librairie et l’encyclopédie proposées sont également un très bon moyen de se renseigner par thématique, avant d’aller plus loin, notamment avec un accompagnement avec un.e conseiller.e spécialisé, en ligne ou en présentiel.
Pendant la période de confinement qui à également signé pour moi le début de mon aventure entrepreneuriale j’ai ainsi pu suivre plusieurs Webinaires gratuites, proposées par BPI FRANCE Création, très complètes et interactives (Quel statut pour mon entreprise ? notamment).
En vous partageant ces différents organismes, sites et entreprises spécialisé.e.s, j’espère vous avoir donné de premières clés intéressantes pour vous aider dans le début de votre grande aventure entrepreneuriale.
Avant de clôturer ce nouvel article, je voulez vous partager également deux entrepreneuses qui m’inspirent chaque jours sur les réseaux sociaux en partageant leurs propre expérience, entre petites galères et grandes joies:
My Better Self: Entre sa Chaine YouTube et sa série Etudiante Entrepreneuse, son podcast In Power et sa page Instagram, de son pseudo, Louise est une inspiration de la première heure, dynamique et engagée, à suivre d’urgence !
Marie Eloy: Présidente du réseau d’entrepreneuse Bouge ta boite & de Femmes et territoire, animatrice du podcast des Echos, Elles ont osé, Marie est un référence dans le monde de l’entreprenariat féminin, et il y a de quoi ! Son LinkedIn est la mise à jour dynamique qui me rappelle que nous sommes un peu plus chaque jour à entreprendre et que rien ne nous arrêtera !
Ce sera tout pour aujourd’hui. J’espère vous avoir encouragé, conseillé et intéressé, j’ai conscience du chantier que représente un tel projet, croyez-moi, je connais les doutes qui assaillent au pire moment, mais je sais surtout que si nous en sommes arrivé là ce n’est pas pour rien, alors Let’s do this !
Prenez soin de vous et des autres, à la semaine prochaine,