Histoires d’héroïnes n°4 – Nawal

De retour On time pour ce nouvel article dédié à une nouvelle héroïne. Des pages aux planches il n’y a qu’un pas, un pas que nous allons franchir aujourd’hui avec cet ode à la résilience. D’une autre culture, d’une autre langue, d’une autre histoire que les miennes, j’ai eu la chance d’incarner Nawal au théâtre, pour une expérience qui reste ancrée en moi comme un mat face à toutes tempêtes. A l’honneur aujourd’hui une expérience artistique plus qu’un récit de vie: Incendies de Wajdi Mouawad.

Au fil des actes, à travers les mots, nous découvrons Nawal et ses maux. Une histoire violente, pour une femme qui brille, qui brûle, devenue flamme au milieu d’un incendie de vie. Une âme tourmentée qui nous bouleverse, questionne, laissant une trace indélébile dans nos cœurs.  

Récit d’une femme qui nous rappelle l’intemporalité et l’internationalisme de nos luttes 

Nawal dans Incendies de Wajdi Mouawad

« Lorsque le notaire Lebel fait aux jumeaux Jeanne et Simon Marwan la lecture du testament de leur mère Nawal, il réveille en eux l’incertaine histoire de leur naissance: qui donc fut leur père, et par quelle odyssée ont-ils vu le jour loin du pays d’origine de leur mère ? En remettant à chacun une enveloppe, destinée l’une à ce père qu’ils croyaient mort et l’autre à leur frère dont ils ignoraient l’existence, il fait bouger les continents de leur douleur: dans le livre des heures de cette famille, des drames insoupçonnées les attendent, qui portent les couleurs de l’irréparable. Mais le prix à payer pour que s’apaise l’âme tourmentée de Nawal risque de dévorer les destins de Jeanne et de Simon« 

– Synopsis « Incendies » de Wajdi Mouawad, éditions Actes sud-papiers

Nawal

D’où vient-on? Peut-on construire un avenir sans connaitre notre passé? Notre origine définit-elle ce que nous sommes, ce que nous devons être? Avec Incendie, Wajdi Mouawad reprend sa réflexion sur les origines, commencée avec la mise l’écriture et la mise en scène de Littoral, réalisée en 1997. Sans être une suite narrative, Incendie se construit sur la même dynamique d’écriture, par le jeu. Par de scénarisation sans mise en scène, pas de mise en scène sans scénarisation. Les acteurs ont autant leur mot à dire que les spectateur.trice.s font vivre la pièce par leurs réactions. Une importance de la temporalité d’autant plus importante que nous commençons dans cette pièce par la fin de l’histoire [celle de Nawal] pour revenir par flash à son origine, à ces éléments qui ont fait que nous nous en sommes – spectateur.trice.s, qu’ils y sont – ses enfants, Jeannes et Simon, là aujourd’hui – à lire son testament.

Dans notre propre mise en scène, réalisée lors de notre année de 1er en option de spécialisé théâtre, nous avons été plusieurs à jouer Nawal. En divisant ainsi le personnage entre plusieurs actrices en fonction de son âge, nous avons appuyé les évolutions vécue par la femme, au court de ces quatre âges de vie, ces quatre incendies; mère enfant effrayée, femme de 40 ans combattante, femme de 60 ans courageuse, femme de 65 ans rassurée. Un femme balancée dans la vie, sans enfance, ou du moins une enfance qui lui a prise son innocence [« L’enfance est un couteau que je me planterai dans la gorge », tableau 7]. Une femme rattachée à une promesse dans un pays en guerre ou les promesses ne valent plus rien, pourtant, comme dernier essor, une dernière lueur d’espoir.

Nawal entant qu’héroïne a cette particularité de ne pas être au premier plan du récit, au contraire, elle est le fil rouge, en arrière plan qui guide ses enfants dans la quête de leur propre histoire, de son histoire. Nawal n’a pas souhaité relier son lourd passé et son présent avec ses enfants, c’est donc à eux de partir à la quête de cette vérité cachée, une fois leur mère morte. Longtemps, je me suis questionnée sur la nécessité de ces mensonges si dévastateurs. Avec le recul, je comprend aujourd’hui que certaines vérités ne peuvent surgir que dans un contexte propice, au risque sinon d’être destructeurs, sans retour possible.

Nawal n’a pas de pouvoir magiques, elle n’a même pas d’armes, au contraire c’est elle que l’on n’utilise comme arme de guerre par le viol et la torture. Elle n’a pas changé les choses, commis des actes de bravoures ayant amené à l’amélioration; mais son histoire est comme un livre d’histoire, témoignage nécessaire de crimes bien réels que nous ne pouvons oublier. Parce que l’histoire de Nawal est une fiction qui cache des récits réels, qui ce sont déroulés, qui se déroulent et qui se dérouleront, des récits que nous devons entendre, percevoir derrière le bruit des bombe, le silence des prisons et l’absence de preuves, elle est nécessaire.

Un murmure qui doit se transmettre pour un jour se transformer en cris, comme toutes ces histoires, qu’elles nous semblent proches ou éloignées, qui se répètent sans jamais évoluer. 

« Maintenant que nous sommes ensemble, ça va mieux » – Nawal, Incendie, p.19

Nous arrivons à la fin de cette article dédiée à une héroïne fictionnelle de théâtre qui m’a bouleversée, Nawal. Et vous quel héroïne de théâtre vous a chamboulé, questionné, remis.e en question? Au plaisir de vous lire dans les commentaire ou sur Instagram !

En attendant, prenez soin de vous, de vos proches. Restons uni.e.s contre la haine, le racisme et toutes les autres formes de discrimination, en ce mois des fiertés, plus que jamais, Black lives matter, LGBT+ lives matter, Women lives matter, All lives matter!

 

 

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